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La République des Lettres

Pierre Bayle

Philosophie

'Elisabeth Labrousse : La Correspondance de Pierre Bayle.

Par Christine Gutman, dernière édition le vendredi 05 juillet 2002.

Né en 1647 dans la famille d'un pasteur au village du Carla dans l'Ariège, Pierre Bayle devient un des philosophes et hommes de lettres les plus connus et les plus universellement admirés de son siècle. Ses principaux ouvrages ont un énorme succès européen, et constituent une très riche source d'inspiration pour les philosophes des Lumières, qui écartent ses déclaratioins "fidéistes" et dirigent son rationalisme critique contre la doctrine chrétienne. Bayle est non seulement un observateur, mais aussi un acteur majeur du débat philosophique sur la théologie rationaliste, sur la possibilité d'une Philosophie chrétienne, sur la cohérence du matérialisme "stratonicien", sur la tolérance et sur les droits de la conscience. L'édition critique de sa correspondance, publiée sous la direction d'Elisabeth Labrousse, comporte quelque vingt volumes et plus de 1600 lettres, avec bon nombre de lettres inédites. Les nombreuses annotations visent à faciliter la lecture en identifiant tous les personnages mentionnés et en donnant toutes les précisions utiles pour saisir le contexte intellectuel de la correspondance.
Tome I: du 21 février 1662 au 13 novembre 1674
Le premier volume permet de suivre le jeune Bayle, au moyen de 65 lettres abondamment annotées, depuis l'Ithaque du Carla, où son père est pasteur, à l'académie de Puylaurens, où il suit les pas de son frère Jacob, au collège jésuite de Toulouse, où il se convertit au catholicisme, en exil à Genève après son retour au protestantisme, au château de Coppet, où il est le précepteur des fils du comte de Dohna, allié du prince d'Orange-Nassau, à Rouen, enfin, où il est de nouveau le précepteur d'élèves récalcitrants -- mais le "relaps" est de nouveau en France, sous le pseudonyme transparent de "M. Bêle", et les événements vont désormais s'accélérer. A Genève, il avait constitué un petit cercle d'amis qui partageaient les mêmes goûts littéraires, classiques et modernes. La dernière lettre du volume I comporte quelque 60 pages manuscrites, écrites à la campagne près de Rouen, où Bayle s'ennuie, privé de livres: composée sous la forme d'une lettre adressée à Vincent Minutoli, il s'agit là d'une première oeuvre littéraire.
Tome II: du 12 novembre 1674 au 19 novembre 1677
Au deuxième volume, nous voyons comment Bayle, grâce à ses amis rencontrés à Genève, fréquente les cercles érudits de Rouen (Emeric Bigot) et de Paris (Gilles Ménage); à Paris, où il devient le précepteur des enfants de Jean de Béringhen, habitant la Place Royale (Place des Vosges), il connaîtra également les pasteurs de Charenton, parmi lesquels Pierre Allix, Samuel Baux de Langle et le célèbre Jean Claude, engagé dans une violente controverse avec les théologiens de Port-Royal. Avec l'encouragement de Jacques Basnage et sous la protection de Pierre Jurieu, Bayle se porte alors candidat à un poste de professeur de philosophie à l'Académie de Financière, il a une certaine sécurité et se consacre à ses chères études, prodiguant les conseils à son frère cadet Joseph, qui poursuit ses études à Puylaurens. Les informations bibliographiques et les allusions philosophiques en deviendront plus denses et plus substantielles. Mais Bayle est sous la tutelle, pour ainsi dire, de Pierre Jurieu, le bouillant théologien, qu'il admire, comme il admire toute la famille du grand Du Moulin, et dont il épouse en premier lieu les positions doctrinales -- contre Pajon, par exemple. Tous les événements de ces premières années à Sedan auront un écho douloureux, après la rupture, lors de la querelle amère entre les deux anciens amis.
Tome III: de janvier 1678 à fin 1683
Les années couvertes par ce volume, 1678-1683, sont des années de crise pour la communauté huguenote et donc aussi pour Pierre Bayle. Nous le retrouvons d'abord à l'académie de Sedan, où il élabore son cours de philosophie, témoignage intéressant sur les progrès de la "nouvelle philosophie". Mais, mesure qui annonce et prépare la révocation de l'Edit de Nantes, l'académie de Sedan est détruite par arrêt du Conseil du 9 juillet 1681. Les professeurs doivent s'exiler. A l'initiative d'Adriaan Paets, oncle d'un ses élèves, une Ecole Illustre est créée à Rotterdam; Bayle y est nommé professeur d'histoire et de philosophie, Jurieu y sera professeur de théologie et ministre ordinaire. Un nouveau monde s'ouvre aux exilés et ils vont jouer tous deux un rôle crucial dans la vie intellectuelle du Refuge. C'est l'époque de compositions décisives de Bayle: son Recueil de 1684 témoigne de l'attention avec laquelle il suit les progrès de la "nouvelle philosophie" . En même temps, il rédige ses Objections contre la philosophie chrétienne, cartésienne, de Pierre Poiret. D'autre part, il envoie à Vincent Minutoli une première version de sa Harangue de M. de Luxembourg à ses juges; sa Lettre à M.L.A.D.C., Docteur de Sorbonne, où il est prouvé que les comètes ne sont point le présage d'aucun malheur paraît anonyme en 1682 et connaît un énorme succès; une deuxième édition, intitulée Pensées diverses, paraît dès l'année suivante. Enfin, Bayle suit aussi de près les publications du Père Maimbourg et lance sa Critique générale: nouveau succès, dont témoigne l'acharnement des autorités françaises, qui condamnent l'ouvrage et le font brûler par la main du bourreau. De professeur pauvre et anonyme, Bayle est devenu d'un coup auteur à succès.
Tome IV: de janvier 1684 au 9 août 1684
Au cours de la période couverte par ce volume, janvier-août 1684, le réseau de Bayle s'étend et la fréquence des échanges s'intensifie. Bien plus de ses lettres ont survécu, à cause de la notoriété que lui confèrent ses premières publications. De plus, il lance, à l'instigation du libraire-imprimeur Desbordes, son périodique intitulé Nouvelles de la République des Lettres: il a besoin désormais de nouvelles fraîches et sûres. C'est ainsi qu'il maintient ses relations avec Henri Justel, récemment réfugié à Londres, Jean Rou à La Haye, Gisbert Cuper à Leyde, Jacques Spon à Lyon et François Janiçon à Paris. Le périodique connaît un succès immédiat et formidable: Bayle a su trouver le ton et ses analyses pénètrent au coeur des problèmes; tous ses lecteurs apprécient cette lucidité et cette distance. Il accède d'emblée au statut de journaliste européen. Il introduit aussi ses amis Daniel de Larroque, Jacques Lenfant, Jacques Du Rondel, auprès de Reinier Leers et les aide à publier leurs premiers ouvrages. Il entre en contact avec Jean Le Clerc, l'érudit arminien, et commente les ouvrages du fantasque beau-père de celui-ci, Gregorio Leti. Enfin, c'est l'époque d'un drame familial: Joseph Bayle, le frère cadet de Pierre, après des aventures obscures à Genève, regagne Paris, où l'attend un poste de précepteur. Mais le jeune homme n'y exerce pas longtemps sa nouvelle charge: une fièvre quarte l'emporte en quelques jours.

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