Otto Weininger

Otto Weininger

Essayiste autrichien d'origine juive hongroise, Otto Weininger est né le 03 avril 1880 à Vienne (Autriche).

Après son baccalauréat et des études de mathématiques à l'université de Vienne, il s'intéresse aux sciences naturelles et à la philosophie sous l'influence déterminante de la pensée kantienne. Très doué pour les langues, il apprend également plusieurs langues étrangères (italien, français, norvégien,...).

En juillet 1902, fraîchement diplômé, Otto Weininger se convertit au protestantisme. Il rencontre Sigmund Freud et tente vainement de faire publier sa thèse de doctorat. Taciturne, solitaire, dépressif, il mène une vie ascétique, se consacrant à la rédaction de son oeuvre majeure, Sexe et Caractère, qui paraît sans grand succès en 1903 aux éditions Braumüller & Co. Il voyage quelques mois en Italie. De retour à Vienne, il loue une chambre dans la maison où mourut Beethoven et se suicide d'une balle en plein coeur le 4 octobre 1903, à l'âge de 23 ans, "pour ne pas avoir à tuer quelqu'un". Après sa mort, deux autres livres seront publiés: Des fins ultimes (1907) et son Journal (1917).

À la fois en rupture avec les idées de la Vienne de son époque et profondément enracinée dans culture "fin de siècle", la singularité et la lucidité de l'oeuvre d'Otto Weininger -- considérée aujourd'hui comme sexiste et antisémite -- lui vaudra un énorme succès posthume ainsi que la reconnaissance de personnalités comme entre autres Sigmund Freud, Ludwig Wittgenstein, Stefan Zweig, Karl Kraus et August Strindberg.

Bien qu'elle se présente sous les traits d'une caractérologie scientifique, l'oeuvre d'Otto Weininger est en réalité une véritable métaphysique du sexe dont le but est de jeter les bases d'une nouvelle spiritualité. L'élément masculin et l'élément féminin sont compris comme les Idées platoniciennes ou des archétypes, en mesure d'expliquer la gamme des comportements empiriques humains. Ainsi, dans cette typologie, le pôle masculin est l'incarnation du principe surnaturel qui préside à la constitution du cadre rationnel et discipliné de l'existence, de la morale, de la logique elle-même. Le principe féminin représente lui, dans ses deux principales variantes, Aphrodite et Demeter, l'abysse vide d'une sphère naturaliste qui tend, dans son irrationalité chaotique, à rendre vaines toutes les conquêtes de la raison. Ce principe féminin s'incarne selon lui dans ce qu'il appelle l'esprit juif.

Pour Otto Weininger, la rédemption de l'humanité, et en premier lieu des femmes -- en raison du caractère démoniaque de "l'éternel féminin" -- ne peut avoir lieu qu'à condition de se détacher de la prison de la nature pour accéder à une liberté supérieure et souveraine. Avec une lucidité rarement atteinte, il a mené jusqu'au bout, dans son existence même, les ultimes conséquences des fourvoiements d'une époque, voire d'une civilisation.

Copyright © Christine Gutman / republique-des-lettres.fr, Paris, dimanche 7 août 2016. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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