Mikhaïl Boulgakov

Mikhaïl Boulgakov

Mikhaïl Boulgakov -- Mihail Afanasevic Bulgavov -- est né le 2 mai 1891 à Kiev (à l'époque partie de l'Empire Russe). Son père est professeur à l'Académie de théologie de Kiev.

Le jeune homme suit des études de médecine et exerce durant quelques années à Viazma (Kiev). En 1919, il abandonne la médecine pour se consacrer à la littérature. Cependant son expérience donnera matière aux Récits d'un jeune médecin, publiés en revue dans les années '20.

De 1920 à 1921, Mikhaïl Boulgakov est à Vladicaucase, où il prend une part active à la vie culturelle aux côtés de l'écrivain Boris Fédorovitch Slezkine. Les Notes sur les manchettes publiées dans divers almanachs témoignent de cette période. Il semble qu'à cette époque Boulgakov, qui optait pour un monarchisme tempéré et que les scènes de violence vues durant la Révolution russe avaient profondément marqué, ait songé à l'émigration.

En 1921, il s'installe à Moscou, où il collabore à diverses revues, écrit des feuilletons, sortes de sketches comiques inspirés de l'actualité quotidienne. Signalons entre autres son passage à la revue des cheminots, Le Sifflet. Il y rencontre un certain nombre de futurs célébrités: Kataev, Olecha, Ilf, Paoustovski... Ces travaux alimentaires seront évoqués plus tard dans Le Roman théâtral, écrit en 1936.

Plus gratifiants sont ceux qu'il exécute pour la revue Nakanune, éditée à Berlin par des émigrés soucieux de rester en contact avec la mère patrie. Son premier roman, La Garde blanche (1925) est partiellement publié dans l'éphémère revue Russie. Au travers des destinées d'une famille de l'intelligentsia proche des Blancs, Mikhaïl Boulgakov y évoque les évènements révolutionnaires à Kiev. Chronique d'une apocalypse, La Garde blanche donne à voir, dans la tradition tolstoïenne, la tragédie des individus pris dans le tourbillon aveugle de l'Histoire. De ce roman largement autobiographique, l'écrivain tirera une pièce de théâtre, Les Journées des Tourbine, qui restera l'un des grands succès du Théâtre d'Art en dépit des attaques dont elle fit l'objet de la part de l'Association Russe des Écrivains Prolétariens (RAPP).

La pièce L'Appartement de Zoïka (1926) est jouée en 1926 et 1927. Pour évoquer la faune des tripots, des maisons de rendez-vous et des fumeries d'opium clandestines qu'avait fait resurgir la "Nouvelle Économie Politique" (NEP), elle allie la satire et la farce à une vision que l'on pourrait parfois qualifier de surréaliste. Dans le même temps, Mikhaïl Boulgakov écrit de nombreux récits dans une veine satirico-fantastique.

Seul le recueil Diableries est publié en 1925. L'auteur y montre la bureaucratisation de la vie, la destruction de la culture, le chaos, les désastres dus au volontarisme. De la même époque date Coeur de chien, brillante nouvelle où, dans la veine Gogolienne, Boulgakov évoque la transformation d'un bon chien en méchant homme. La pièce La Fuite (1926-27) met en scène sur un mode semi-onirique la vie tout à la fois drôle et tragique des émigrés.

Dans L'Île pourpre (1928), Mikhaïl Boulgakov parodie le théâtre de gauche. En 1929-30, la situation de l'écrivain semble désespérée. Ni publié ni joué, soumis au feu roulant de la critique, il est profondément déprimé. Il écrit alors à Staline une série de lettres pour lui demander à s'expatrier. Celui-ci lui téléphonera le 18 avril 1930. À la suite de cette conversation où, pris de court, il est largement perdant (il ne s'en rendra compte que bien plus tard), il obtient un modeste emploi d'assistant metteur en scène au Théâtre d'Art.

Adaptations et travaux alimentaires se succèdent. Sa pièce sur Molière, La Cabale des dévôts, est presque aussitôt retirée de l'affiche. Son Don Quichotte ne verra pas le jour de son vivant. La pièce qu'il consacre à Pouchkine, Les Derniers Jours, est également interdite. En 1936, il quitte le Théâtre d'Art pour le Bolchoï et écrit des livrets d'opéra.

En 1938, cédant au désir fallacieux d'établir un contact avec "les instances supérieures", il écrit Batoum, une pièce sur la jeunesse de Staline, qui est également refusée. On peut penser que cette démarche fut dictée par le souci de pouvoir présenter aux autorités sa grande oeuvre, Le Maître et Marguerite, commencée en 1928, et à laquelle l'écrivain travailla jusqu'à ses tous derniers jours. Il y donne sa pleine mesure, alliant satire, sens théâtral et poésie à une profonde méditation sur le bien et le mal saisis au travers de la problématique de l'écrivain face au pouvoir totalitaire.

Pratiquement exclu de la vie littéraire de son temps, Mikhaïl Boulgakov meurt le 10 mars 1940 à Moscou. Il reste l'un des plus grands écrivains russes du XXe siècle. Satiriste incisif, styliste nerveux et brillant dont la prose tout entière est marquée par sa passion du théâtre, il s'inscrit dans la lignée des grands classiques qu'il prolonge avec une vigoureuse originalité.

Copyright © Marianne Gourg / republique-des-lettres.fr, Paris, lundi 8 août 2016. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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