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Goscinny

Goscinny

Goscinny et René Goscinny, profession humoriste.

Le monde de la bande dessinée rend hommage à René Goscinny, roi du gag, père d'Astérix, de Lucky Luke, d'Iznogoud, d'Oumpapah et du Petit Nicolas, mort d'une crise cardiaque il y a vingt ans, le 5 novembre 1977, à 51 ans. Deux livres saluent sa mémoire: le jour même de l'anniversaire de sa mort sort chez Actes Sud Goscinny de Marie-Ange Guillaume. Elle a été secrétaire de rédaction à Pilote de 1972 à 1976 du temps où René Goscinny en était le rédacteur en chef. Cette biographie exhaustive est préfacée par sa fille, Anne Goscinny, qui écrit: "j'avais neuf ans quand mon père est mort... Ce livre comble un manque. Combien de fois, en rêve, je lui ai demandé: s'il te plaît, dessine moi ton enfance!" Trois jours plus tard, les éditions Dargaud, qui inventèrent Pilote, publient René Goscinny, profession humoriste, un ouvrage chronologique, abondamment illustré, écrit par Anne Goscinny, Guy Vidal, fidèle ami, directeur littéraire chez Dargaud qui officia à Pilote, et Patrick Gaumer, l'auteur du Dictionnaire Larousse de la BD. Enfin, le magazine Les Inrockuptibles éditent un supplément gratuit, disponible en kiosques avec le journal dès le 5 novembre: 20 pages de propos et dessins inédits de Goscinny et de tous ceux qui l'ont connu.
Fils d'immigrés polonais, né à Paris le 14 août 1926 mais installé deux ans plus tard en Argentine - ce sont ses souvenirs de l'école française de Buenos Aires qu'il a racontés dans Les aventures du petit Nicolas que Sempé illustra --, le jeune René a fait aux Amériques 101 métiers: aide-comptable, interprète, dessinateur de pub, illustrateurs de livres pour enfants... avant de trouver sa voie à Paris. En 1951, Goscinny, "qui n'aimait pas trop dessiner", rencontra un certain Albert Uderzo "qui n'aimait pas trop écrire". S'engagea alors une collaboration qui ne devrait prendre fin qu'un soir de novembre. L'aventure gauloise a crevé tous les plafonds de la notoriété (280 millions d'albums d'Astérix vendus à travers le monde) et a poursuivi sur sa lancée après la mort de René, Albert ayant repris seul le flambeau (le 30ème album, La galère d'Obélix, sorti en octobre 1996, a dépassé les 2,8 millions d'exemplaires). Uderzo lui fait connaître Morris en 1954, avec lequel Goscinny crée Lucky Luke, le cowboy qui tire plus vite que son ombre. Lui aussi survécut à son scénariste et a fêté en septembre ses 50 ans, toujours fringant. Avec la sortie de OK Corral, 78ème tome de la série, il talonne l'irréductible gaulois avec 250 millions d'albums. Goscinny, ce fut aussi Oumpapah, le peau rouge athlétique (avec Uderzo), Iznogoud, l'affreux vizir qui jamais n'a réussi à "être calife à la place du calife" (avec Tabary), les Dingodossiers (avec Gotlib), "Le potache est servi" (avec Cabu)... Goscinny pilota également avec son complice Jean-Michel Charlier (le scénariste de Bluberry) l'aventure Pilote, le journal qui devait faire sortir la BD de l'enfance. Et puis, ce fut aussi les studios Idefix qui animèrent son univers, ou encore son nom au générique du Viager de Pierre Tchernia, qui préface le livre collectif que Dargaud sort en hommage. Il y a vingt ans, René buvait sa dernière "potion magique", mais les héros ne meurent jamais et Goscinny vit toujours.

Copyright © N. B. / La République des Lettres, samedi 01 novembre 1997


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