La République des Lettres



France Soir

France Soir

La cession de France Soir est confirmée en faveur de Jean-Pierre Brunois.

Depuis le réquisitoire du 12 mai de l'Avocat général Catherine Champrenault, peu de personnes se faisaient encore d'illusions sur la décision qui allait être rendue par la Chambre commerciale de la Cour d'appel de Douai sur le cas de France Soir. Le Parquet avait en effet estimé que les trois recours en nullité formés par le Comité d'entreprise de France Soir, la société éditrice Press Alliance et le groupe Moscow News d'Arcadi Gaydamak, devaient être rejetés. C'est fait. Le tribunal a rejeté les appels et a donc confirmé comme repreneur de France Soir la société VME Patrimoine du promoteur immobilier Jean-Pierre Brunois, associé au journaliste Olivier Rey.
Comme prévu également, une partie des salariés, en grève depuis le 12 avril et qui souhaitait se vendre à un mafieux israélo-russe incapable de présenter la moindre garantie financière et en délicatesse avec le fisc et la justice française, ne va sans doute pas se retenir maintenant d'achever son journal agonisant, aboutissement programmé de la logique suicidaire dont elle a fait preuve depuis le début de l'affaire. Il est en effet peu probable que les nouveaux repreneurs, qui présentent pourtant un plan réaliste même si celui-ci est douloureux -- seulement 51 salariés conservés sur 112 pour faire un tabloïd inspiré des journaux populaires d'outre-manche -- étant donné leurs moyens (5 millions d'euros), puissent réellement faire face aux dures réalités de la gestion d'un tel titre à relever entièrement dans le contexte du marché actuel de la presse, d'autant qu'ils auront probablement aussi à faire face à la guerre de tranchées qui va maintenant leur être déclarée par les 61 licenciés et leurs amis: grèves, plaintes aux prud'hommes, entraves matérielles, financières et mondaines diverses, etc... Il n'est même pas sûr que le journal puisse encore compter sur l'aide de l'Etat apportée aux quotidiens à faibles ressources publicitaires.
La France peut donc tourner la page de son ex-grand quotidien populaire. France Soir est mort. Et, s'il est toujours triste de dire adieu à un titre de presse, nous nous permettrons de rajouter: Bon débarras ! Bon débarras, car il n'a échappé à personne, même aux quelques people rassemblés par les ex-salariés fossoyeurs pour défendre leur cause, que le France Soir qui était publié ces dernières années n'avait plus rien à voir avec celui de son fondateur, Pierre Lazareff, dont ils ne cessaient abusivement d'invoquer la mémoire. France Soir, pour nombre de français qui d'ailleurs avaient cessé de le lire, n'était plus qu'un vulgaire torchon bien peu digne d'être encore appelé journal, et les fameuses pages "Politique" et "Culture", que Brunois et Rey veulent supprimer dans leur projet éditorial et qui sont si angéliquement mises en avant par les grévistes, ne méritent bien en réalité que de passer aux oubliettes.
France Soir est mort depuis longtemps. Souhaitons que ses fossoyeurs -- journalistes conservés, licenciés et nouveaux propriétaires -- cessent de le souiller et finissent de l'enterrer maintenant avec un peu plus de décence.

Copyright © N. B. / La République des Lettres, mardi 16 mai 2006


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