République des Lettres

Ernest Hemingway

Un américain à Cuba

Ernest Hemingway, bien qu'américain, n'appartient pas aux yeux des Cubains à la race honnie des yankees et autres impérialistes régulièrement dénoncés à La Havane. Il est révéré dans l'île où il a vécu plus de 20 ans. Un monument en bord de mer, dans le petit port de Cojimar, est consacré à l'écrivain-pêcheur, et sa maison de San Francisco de Paula, une petite ville à une quinzaine de kilomètres de la capitale cubaine, est devenue un musée. Ses fidèles peuvent encore hanter ses lieux de prédilection dans la vieille Havane, du bar "Floridita" à celui de "La Bodequite" en passant par l'hôtel Ambos Mundos où il séjourna dans les années 30.
C'est à "La Vigia", une grande maison blanche sur une colline achetée par l'écrivain en 1939 et où il vécut 22 ans, que se déroulent souvent les colloques internationaux consacrés à Hemingway. Ils réunissent à chaque session une centaine de spécialistes venus du monde entier qui réfléchissent à l'oeuvre d'Hemingway.
Devenue le musée Hemingway après avoir été léguée par sa veuve Mary Welsh au gouvernement cubain en 1961 après le suicide de l'écrivain, la "Finca Vigia" a été préservée en l'état jusque dans les moindres détails. Le temps semble s'y être arrêté. On y voit sa machine à écrire -- une Royal portable -- , sur laquelle il écrivait debout dès l'aube, mais aussi ses trophés de chasse (des têtes d'impalas, d'antilopes et de buffles empaillées), ramenés d'Afrique par l'écrivain. Les murs sont ornés d'affiches de corridas espagnoles des années 30. On peut voir aussi son uniforme de correspondant de guerre, des cadavres de bouteilles de whisky et même la liste de ses pesées quotidiennes annotée avec soin. Depuis près de 20 ans, Elisa Perez Fernandez raconte aux visiteurs les habitudes quotidiennes d'Hemingway, détaille ses problèmes de santé: "il avait mal au dos, souffrait d'un diabète et avait un cancer de la peau". Elle évoque aussi ses invités (les célèbres toréros espagnols Dominguez et Ordonez) et parle avec tendresse de ses quatres chiens, dont les tombes s'alignent dans le jardin.
Elle avoue n'avoir jamais lu en entier un seul livre d'Hemingway, mais connaît par coeur les titres de sa bibliothèque, dont ceux des éditions originales traduites en plusieurs langues et ceux de sa collection de près d'un millier de disques. Le musée abrite également le bateau de l'écrivain, El Pilar, sur lequel il partait pêcher avec son fidèle capitaine Gregoria Fuentes, qui servit de modèle au héros du livre qui lui valut le prix Nobel en 1954, Le vieil homme et la mer. Centenaire depuis quelques jours, Fuentes vit toujours dans sa petite maison de Cojimar, entouré de photos de l'écrivain. Il ne manque pas une occasion de parler de "Papa", comme était affectueusement surnommé Hemingway. Celui que l'écrivain avait décrit en disant que ses "yeux étaient de la couleur de la mer, gais et invaincus" reconnait que depuis la mort de l'écrivain il n'a jamais voulu reprendre la mer. Son livre d'or est régulièrement rempli de commentaires écrits par des visiteurs du monde entier. Les pages sont ensuite remises au Musée "La Vigia", "pour que Fidel castro puisse les voir", précise-t-il.

La République des Lettres, jeudi 1 mai 1997

 

 

 

 

 

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