Adolf Eichmann

Un représentant de la communauté juive d'Allemagne, Michel Friedmann, a mis en garde contre la publication dans la presse allemande des mémoires d'Adolf Eichmann sans éclairage historique.

"Adolf Eichmann a été l'une des plus importantes figures de la machine meurtrière nazie: un assassin bureaucratique, un apparatchik, apparemment insensible", écrit-il dans le quotidien Express de Cologne (Ouest). "Aujourd'hui, nous sommes confrontés aux "mémoires d'Adolf Eichmann" (...) J'invite à ne pas consommer ces textes sans commentaires et sans accompagnement historico-scientifique", ajoute M. Friedman, qui est membre de la direction du Conseil Central des Juifs en Allemagne. "Il ne doit y avoir aucune ambiguité, en particulier pour les jeunes", poursuit-il. "Un meurtrier, un antisémite terrible, un ennemi du genre humain était à l'ouvrage. Il n'a pu agir que parce qu'une dictature violente et une population indifférente l'ont permis", soutient-il.

Les avis sont très partagés en Allemagne sur la publication intégrale dans le quotidien Die Welt de la première version de ces mémoires d'Adolf Eichmann, un manuscrit de 127 pages. Il s'agit d'une "bêtise grossière", a estimé le directeur du Centre de recherche sur l'antisémitisme de l'Université technique de Berlin, Wolfgang Benz, estimant que c'était accorder trop d'importance à un simple "directeur ministériel". "Il suffirait largement qu'une poignée d'historiens connaissent le texte, l'analysent dans le contexte d'autres sources et en publient le résultat pour le grand public", a ajouté M. Benz dans le quotidien berlinois Tagesspiegel.

L'écrivain néerlandais Harry Mulisch, qui a perdu une partie de sa famille dans le camp de cencentration de Sobibor, estime au contraire que "tout le monde doit pouvoir lire" ces textes. Il est beaucoup plus dangeureux de garder ces documents secrets, a estimé M. Mulisch dans Die Welt. "Ce texte ne changera pas notre vision d'Adolf Eichmann, mais il est intéressant", a-t-il ajouté.

Adolf Eichmann y expose notamment sa version de l'Holocauste et prétend n'avoir eu aucun rôle clef dans la "solution finale". Le ministère israélien de la Justice a donné mardi son feu vert à la publication de mémoires plus exhaustives d'Adolf Eichmann, un manuscrit de 1.200 pages rédigé en prison -- et semble-t-il "réécrit" par la censure israélienne -- avant sa condamnation à mort et sa pendaison en 1962 en Israël.

Copyright © A. M. Levy / republique-des-lettres.fr, Paris, dimanche 15 août 1999. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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