Frederick Forsyth

Frederick Forsyth, l'ancien pilote de la RAF, a décidé de ne plus écrire de romans. Après dix romans d'espionnage et 50 à 60 millions d'exemplaires vendus, plus aucun sujet ne l'excite et le romancier anglais part en guerre contre l'Europe. "J'ai été 12 ans journaliste, 27 ans romancier, cela fait 39 ans, presque une carrière", dit l'auteur de Chacal, des Chiens de guerre et de Icône, son dernier roman. "C'est de plus en plus difficile de trouver un sujet qui m'excite. J'ai traité tous les sujets qui m'excitent, les nazis, le terrorisme, les enlèvements, la Guerre du Golfe, la nouvelle droite en Russie. Je veux vouer plus de temps à ma famille, ma ferme, mes amis, à la pêche sous-marine". Un sujet toutefois l'excite et le hérisse encore: l'Europe. "Le processus d'accélération vers l'euro est présenté derrière un vrai rideau de mensonges. Les chiffres sont faussés. L'arrogance et la corruption à Bruxelles sont scandaleuses, mais personne n'ose le dire. (...) Le système gouvernemental de cette nouvelle Europe sera basé sur l'apothéose du bureaucrate bruxellois, du juge à Luxembourg et du banquier de Francfort. (...) Je ne vois pas de bonne raison d'abandonner mille ans de souveraineté et 300 de gouvernement parlementaire pour être gouvernés par des bureaucrates, juges et banquiers. (...) Ce qui n'est pas expliqué aux Français est le prix que vous allez payer. Vous allez abolir le franc français à tout jamais. Lisez la clause 30 du Traité de Maastricht, vous allez transférer les réserves d'or à Francfort, vous serez gouvernés par Francfort. (...). Quant à Tony Blair, c'est un homme d'une ambition acharnée, largement sans scrupules. Nous allons passer un an intéressant. Il sera complètement discrédité".

Loin des élections britanniques, l'ultime roman de Frederick Forsyth, Icône, se déroule dans la Russie de 1999. La mafia et la corruption gangrènent tous les rouages. Un certain Igor Komarov, successeur de Jirinovsky à la tête du principal parti d'extrême-droite, a toutes les chances de gagner démocratiquement les élections présidentielles. "L'idée m'en est venue lorsqu'en 1993, Jirinovsky a pris un tiers des votes, raconte Frederic Forsyth. La force de l'ultra-droite en Russie, qui n'a rien à voir avec un Le Pen m'a impressionné. J'ai évoqué cette hypothèse devant l'établissement anglais et américain. Que feriez vous? Rien. On n'interfère pas dans les affaires d'un Etat ami, la Russie est maintenant un Etat ami et ce serait contre-productif". Dans le roman, Komarov, à quelques mois du scrutin, couche sur le papier ses idées. Ce terrible "manifeste noir" préconise un deuxième Holocauste, dont les victimes ne seraient pas seulement les Juifs de Russie mais aussi plusieurs minorités nationales installées dans le pays. Son secrétaire laisse traîner ce document, un homme de ménage le prend et le jette dans l'auto d'une employée de l'Ambassade de Grande-Bretagne, parce le drapeau qui y flotte lui rappelle celui de soldats qui l'ont aidé pendant la guerre. C'est le début d'une épopée qui mène, avec de nombreux personnages (57, selon la liste en fin d'ouvrage), dans des lieux multiples, de Nairobi aux Caraïbes, de Moscou à Washington.

Copyright © Jean Bruno / republique-des-lettres.fr, Paris, jeudi 01 mai 1997. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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