Beau projet que cet album de William Ewing sur le corps. Du squelette aux chairs, de l'homme à la femme sans compter l'hermaphrodite, de l'athlète à la tendre rêveuse, de l'ethnologie à la médecine, William Ewing nous livre un étonnant manuel des usages et des visibilités du corps.
On retrouve ici les grands: les détails mégalithiques de Coplans, le voile de Blumenfeld, les graphismes de Callahan et de Crane, les peaux plissées de Trémorin, Mapplethorpe et Weston, mais aussi des anonymes, des spécialistes de monstres de cirque ou de bocaux d'anatomie...
Marque de beauté, le corps est étalement témoin quand le photographe se fait archiviste des camps nazis ou d'une crucifixion, quand l'image se fait substitut fantasmatique d'exactions réelles. Comme dans notre contemporain des médias, les violences n'ont pas effrayé l'auteur. Mais l'Eros, hélas, si ! Son chapitre "Eros" est presque aussi prude que froid. Ont bien plus d'érotisme des photos injustement accusées de pornographie, qu'elles soient licencieuses de la Belle époque, de Man Ray, Sarah Moon, Helmut Newton, Jean-loup Sieff (ici sous représenté sinon oublié) ou recueillies parmi Club, Penthouse et autres extases pornos de Sainte-Thérèse de sex-shop.
Malgré ce dérapage, on peut espérer que cet ouvrage sera suivi d'un bis sur le paysage.
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William A. Ewing, Le Corps, Oeuvres photographiques sur la forme humaine (Éditions Assouline).