La République des Lettres > Carlos Fuentes > Carlos FuentesCarlos Fuentes : Diane ou la Chasseresse solitaire.Un tel titre laisse présager un conte mythologique, une parabole romantique. C'est un simple récit, une confession. Mais qui, à travers les paradigmes de la passion et du destin, parvient à l'universel. Loin des grands massifs romanesques de Terra nostra et de Christophe et son oeuf, où le fantastique pénètre plusieurs niveaux de réalités, où pullule l'efflorescence des langages, ce n'est qu'une histoire, linéaire et entraînante. Diane a emprunté le chemin de la star de cinéma en perte de vitesse. Elle tente d'inverser ou de s'attacher la fatalité. Carlos Fuentes lui-même, Don Juan aussi professionnel qu'écrivain, l'a rencontrée lors d'une soirée, puis file avec elle le grand amour dans une ville perdue du désert mexicain où elle tourne un western de seconde zone. Un matin, en regardant la photo d'un précédent amant (Clint Eastwood), elle lui lance: "Cher ami, cela fait deux semaines que vous prenez votre plaisir. Quand songerez vous au mien ?" Le coup porte au coeur de l'amant attentionné. Puis, insulte suprême à l'écrivain: "Ce que tu peux manquer d'imagination". Les parts d'ombre de Diane, la face cachée de l'astre de l'amour sont soudain béantes. Quand nous n'ignorons rien des crèmes vaginales de la belle, nous ignorons presque tout de ses profonds secrets, amants précédents et tourments futurs... Bien sûr, ce militant harcelé, violent, des Black Panthers représente une figure de la passion plus grandiose que celui qui ne sait qu'aimer et noircir des feuillets: "J'étais son amant parce qu'on ne laissait pas entrer au Mexique son véritable lover, le leader des Panthères Noires". Soudain, elle change d'amant: "Tu écris mais tu n'agis pas". "Carlos Ortiz est capable d'escalader des montagnes pour sa cause, pas toi". Au-delà de l'actrice déchue, elle se veut "accoucheuse de révolutions". Elle aime le risque et se compromet auprès de la police locale et du FBI, elle aime embrasser les grands idéaux de l'époque et leurs héros: "Elle croyait que l'injustice se combat non seulement par la politique, mais par le sexe, l'amour et les abîmes du romantisme. Cela la rendait extrêmement vulnérable". Elle sera en effet vaincue par la calomnie du FBI.
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