Arcadi Gaydamak

Arcadi Gaydamak

Arcadi Gaydamak (ou Arkady Gaydamak) est un homme d'affaires israélo-franco-russe à l'image sulfureuse qui a mené toute sa carrière dans des milieux interlopes. Son très opaque groupe de médias Moscow News, présidé par Alexeï Linetsky, est plus ou moins accusé d'opérer à l'échelle internationale avec la mafia israélo-russe dans divers trafics et opérations de blanchiment d'argent sale. En avril 2006, candidat malheureux à la reprise du quotidien France Soir, sa société n'a pas même été en mesure de fournir au Tribunal de Commerce de Lille, qui le demandait expressément, l'origine des fonds qu'elle comptait investir dans le journal, ni apporter non plus aucune garantie de banque française. Le parquet a en outre saisi à son propos Tracfin, la cellule anti-blanchiment du Ministère des finances. De plus Arcadi Gadaymak lui-même, qui doit 33 millions d'euros au fisc français et a été condamné à 13 mois de prison avec sursis pour fraude fiscale, est directement impliqué dans plusieurs dossiers troubles. Il fait l'objet d'un mandat d'arrêt international qui lui a été délivré en décembre 2000 par le juge Philippe Courroye dans le cadre de l'affaire Falcone, dite de l'Angolagate, sombre trafic d'armes vers l'Angola mêlant politiciens (Jean-Christophe Mitterrand, Charles Pasqua), jet-setters (Paul-Loup Sulitzer), escrocs et barbouzes de tous poils. Cette affaire a déjà amené Pierre Falcone en prison mais son associé Gadaymak a préféré lui ne pas répondre au juge et a fait jouer ses quatre passeports -- russe, israélien, angolais et canadien -- pour aller se terrer en Russie, dans les bureaux de son hebdomadaire pro-libéral et pro-gouvernemental Moskovskie Novosti (Les Nouvelles de Moscou), et en Israël où il possède le club de foot de Jérusalem et bénéficie de la protection des ligues d'extrême-droite. Son parcours sinueux présente plusieurs autres taches sombres.

Né le 8 avril 1952 à Moscou, Arcadi Gadaymak passe son enfance dans sa riche famille entre la Russie et Israël. Il arrive en France à l'âge de 20 ans où il monte bientôt une agence de traduction franco-russe qui lui permet de rencontrer de nombreux oligarques et autres personnalités politiques des pays de l'Est en relation avec l'Occident. Il gagne tellement d'argent douteux qu'il ne tarde pas à faire l'objet d'importants redressements fiscaux. A partir de la fin des années '80, et surtout après la chute du Mur de Berlin en 1989, Arcadi Gaydamak se lance dans l'Import-Export, se spécialisant dans la vente d'armes de guerre. Il s'associe au groupe des frères Tchernoï qui détournent au début des années '90 plusieurs dizaines de millions de dollars à la Banque centrale de Russie dans l'affaire dite des Avisos. Il fait fortune en surfant sur divers dossiers internationaux chauds, dont entre autres celui de l'Angolagate pour la vente d'armements ou celui de la société Africa-Israël pour le commerce de diamants, encaissant à chaque fois entre la Russie, la France, Israël et l'Afrique, de juteuses commissions. Son entregent est notoirement aussi large dans les milieux politico-mafieux que dans les services secrets et les chambres de commerce du monde entier. Arcadi Gaydamak reçoit en 1996 la médaille du Mérite remise par un proche de Charles Pasqua, l'ex-préfet barbouze Jean-Charles Marchiani, après des opérations de libération d'otages français en Bosnie et en Tchétchénie grâce à ses relations dans l'ex-KGB soviétique. Côté immobilier, il collectionne parallèlement une affaire d'escroquerie autour des financements de la somptueuse villa du promoteur Christian Pellerin agrandie à l'infini mais sans permis de construire sur une zone protégée de la Côte d'Azur.

Comme tout riche affairiste qui se respecte, Arcadi Gadaymak a également mis le pied dans le business sportif, commençant par se lier avec un homme d'affaires russe mis en cause dans la fraude des Jeux Olympiques de Salt Lake City, puis sponsorisant divers clubs avant d'acheter le Basket Hapoël de Tel Aviv et le Beitar Football Club de Jérusalem, ce dernier étant réputé pour sa violence, son nationalisme et ses liens avec l'extrême-droite israélienne. En France il s'était mis sur les rangs pour racheter le PSG à Canal+ avant que le club parisien soit cédé à un autre acheteur. Avec les affaires, les médias et le sport, il ne faut pas non plus oublier la politique, les mondanités et les oeuvres caritatives. Arcadi Gaydamak donne 50 millions de dollars à l'Agence juive (organisation chargée du retour des Juifs en Israël), organise un luxueux banquet de 1.400 couverts qui réunit pour fêter le nouvel an tout le gotha du showbiz et du monde politique israélien, et finance ou dirige plusieurs sociétés religieuses de bienfaisance juives comme entre autres la KEROOR, organisation de défense des Juifs religieux en Russie.

Le milliardaire s'est aussi acquis une grande popularité en distribuant de l'argent et en organisant des camps de vacances pour les habitants de Galilée visés par les tirs de roquettes du Hezbollah chiite libanais durant la guerre d'Israël contre le Liban en 2006. Il vient de créer Justice sociale, un parti politique russophone qui devait à l'origine prendre le nom de Betar (en triple référence au mouvement sioniste nationaliste, à son club de foot et à la section Jeunesse qu'il préside au sein du Likoud) et qui ambitionne de rafler un tiers des sièges à la Knesset (le Parlement israélien) lors des élections législatives de 2010. Arcadi Gaydamak espère également se faire élire à la mairie de Jérusalem, toujours en s'appuyant sur le soutien de la communauté des Israéliens originaires de l'ex-URSS, de l'extrême-droite et des Juifs religieux orthodoxes. En attendant il continue d'asseoir son emprise sur la ville par de nombreux achats, dont notamment ceux des magasins Tiv Taam et de l'hôpital Bikour H'olim.

Arcadi Gaydamak a récemment fait son entrée à la Bourse de Tel-Aviv en prenant le contrôle de la société immobilière d'investissement et de développement OCIF. Sa fortune est estimée à 1,25 milliard de dollars. Il risque d'être arrêté et emprisonné pour plusieurs années s'il met les pieds sur le territoire français.

Copyright © A. M. Levy / republique-des-lettres.fr, Paris, mercredi 10 août 2016. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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