Saddam Hussein

Saddam Hussein

Bien que les autorités irakiennes n'aient diffusé aucune image officielle, une vidéo de l'exécution de Saddam Hussein (voir ci-joint), condamné à mort le 5 novembre dernier pour crimes contre l'humanité et pendu le 30 décembre dans une caserne militaire de Bagdad, a été mise en ligne par une source anonyme le jour même vers 22h (heure française) sur les principaux sites internet de partage de vidéos.

Les chaînes de télé arabe Al-Jazeera et américaines Fox News et ABC News l'ont imédiatement diffusé. Probablement tourné avec un téléphone portable dans une salle exiguë au milieu d'une petite foule de témoins, le film montre les préparatifs de l'exécution par des bourreaux encagoulés s'affairant autour d'un Saddam Hussein calme et digne. Quelques cris sont scandés, invoquant notamment le nom du leader chiite Moqtada Sadr -- ennemi juré de la communauté sunnite à laquelle appartenait l'ex-dictateur --, puis le condamné récite la chahada, la profession de foi musulmane. La trappe s'ouvre avant qu'il n'achève son ultime prière. Saddam Hussein, 69 ans, est mort les yeux ouverts, emportant avec lui de nombreux secrets compromettants pour plusieurs pays occidentaux -- dont les Etats-Unis -- plus ou moins impliqués dans les crimes et les génocides commis par le régime. Il n'est pas encore 06h00 (03h00 GMT), ce 30 décembre 2006, jour sacré du calendrier musulman qui marque le début de l'Aïd al-Adha (aussi appelée Aïd el-Kebir), la grande fête du sacrifice et du pardon.

Le choix de cette date symbolique pour pendre Saddam Hussein, auquel n'est évidemment pas étranger George W. Bush, a provoqué de nombreuses réactions dans les pays arabo-musulmans. L'Egypte "regrette" ce choix qui "ne tient pas compte des sentiments des musulmans et du caractère sacré de ce jour de pardon". En Palestine, le mouvement islamiste Hamas au pouvoir accuse les Etats-Unis de "franchir la ligne rouge" en envoyant un "message de menace à la rue arabe". En Arabie saoudite, on déplore également ce choix qui cause "un sentiment de consternation". La Libye décrète un deuil national de trois jours pour Saddam Hussein et annule les activités de célébrations prévues pour l'Aïd Al-Adha. La Tunisie estime quant à elle que cette décision constitue "une attaque grave contre les sentiments des musulmans au moment où ils célèbrent une fête religieuse sacrée". Par ailleurs de nombreuses organisations arabes ainsi que des associations internationales de défense des droits de l'homme, dont Amnesty International et Human Rights Watch, estiment que le procès de l'ancien président irakien a été une mascarade judiciaire et l'exécution précipitée.

En France le ministère des Affaires étrangères a simplement "pris acte de l'exécution de Saddam Hussein", Jacques Chirac et la Droite se murant dans le silence tandis que les partis d'opposition la condamnent. Elle "ne règlera rien" aux difficultés actuelles de l'Irak pour François Hollande (Parti Socialiste) et "le procès, ordonné par l'occupant américain, a violé les règles élémentaires du droit de la justice pénale internationale" pour Jack Lang (Parti Socialiste). Pour le Parti Communiste elle "ne contribuera pas à l'expression nécessaire de la justice à laquelle le peuple irakien a droit". Le Front National de Jean-Marie Le Pen juge quant à lui que cette pendaison est "une faute lourde dont la responsabilité retombera sur le monde occidental considéré par le monde arabe comme l'organisateur de cette justice de vainqueur".

Copyright © A. M. Levy / republique-des-lettres.fr, Paris, dimanche 31 décembre 2006. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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