STATION FRACTALE XLVII
Mix : 22 .01. 06
Ce matin j'ai vu le soleil se lever avec toi à Persepolis
Aujourd'hui, comme il y a trente ans
Le recommencement du monde
L'irruption irrésistible de la jeunesse du monde
De la jeunesse absolument irrésistiblement
Contre cette sombre forêt de colonnes
D'ordre injuste et immuable
-- Son heure est-elle donc si vite passée?
J'ai cru qu'il y avait de la neige, en fait il pleuvait
A trente ans de ratage notre intersection était parfaite
Cela s'appelle une joie inaugurale
L'envol épocal dans la lumière
L'Aiôn -- un même flash prophétique
A 8000 kms de distance
J'ai à nouveau vu le monde basculer sur ses assises
(Are you OK ?)
Et la guerre se répandre à vue d'oeil
My Love, My shadow
Mon ombre m'a quitté pour te suivre
A travers les ruines de l'Asie à feu et à sang
Où couvent les guerres futures
Le basculement du monde prendra-t-il la forme
D'une lutte sans merci?
Tout se passera-t-il comme dans ce tableau d'Altdorfer
Sur la Bataille d'Issos
Ou assistera-t-on plutôt à la lente lutte à mort
Entre deux lutteurs Sumo
Qui écraseront le monde entier
Dans leur chute?
Qui pourra le dire au point
D'indécidable où nous sommes?
La lutte pour la hégémonie des races,
L'impitoyable choc des intérêts
(Et non des civilisations ou des cultures),
Semblent, dirait-on, s'être engagés.
Est-ce ce qu'on appelle l'Après-Guerre Froide,
Le Nouvel Ordre du Monde?
Tout ce que l'on peut savoir
C'est qu'il faut que l'hiver soit bien mauvais
Pour que le loup sorte du bois
Et pour que les chiens de guerre les plus mauvais
Montent en première ligne...
A nouveau se profilent à l'Est
Les plus anciens Empires
"...Mais aussi nos rivales
De haut vol et d'égale envergure..."
Merci Françoise, Françoise Douay
Bonjour le Nouveau Moyen Age
Un basculement multi-millénaire
N'est-il pas déjà largement en cours?
Avons-nous déjà raté
La grande bifurcation?
Le point de retournement
Qui aurait pu in extremis
Nous assurer le salut
Pour et par la raison nouvelle
A-t-il déjà été dépassé?
A nouveau se profile à l'horizon
La rage des vaincus
Et le cri de vengeance
Des damnés de la terre
Le devenir en est-il venu
A ne plus dépendre
Que de la force crue
Des dominants
Et de la terreur nue ? Syriana
Quelle est donc cette 4ème Merci George Clooney
Guerre Mondiale qui viendrait
Dit-on de commencer?
Quel Grand Jeu pour quel enjeu?
N'est-il pas bien temps enfin
De s'adapter pour survivre?
Est-ce une guerre contre la Modernité
Ou une guerre contre l'Occident?
(Une guerre ne peut-elle pas
En cacher une autre?)
Ou bien plus simplement
Une guerre entre les esclaves
Et leurs nouveaux Maîtres?
Il n'y a plus d'oligarchie bien tempérée
Un vent froid balaye les structures
Chacun se range ou se planque
Se claquemure ou rase les murs
Ou carrément déménage dans le virtuel
Flexibilité. Dégraissage. Compétition
Derrière le grand Marché se profile
La mise au pas, la militarisation
Pour tirer son épingle du jeu,
Pour sauver plus que les apparences, les meubles
Quand tout le monde -- des grands aux petits --
Se met à courir dans la campagne
N'est-ce pas déjà le signe vaticinant
De la Fin des Temps?
Quand les nuages d'orage s'amoncellent
Et la musique shivaïte
Envahit le pays
Alors le grand Hallowe'en commence
Dead can dance
Pourtant, combien de matins encore
Il m'a été donné de te voir,
Taïshan, Montagne céleste de Pound
Délirant dans sa cage à Pise,
Telle un immense trirème
Mouillé dans les eaux calmes de l'aube?
Depuis combien d'années déjà
Est-ce que nous vivons en guetteurs
Sous les paupières de l'aurore?
Rien n'est plus beau
Qu'un printemps contrarié
Au fond de l'hiver encore
J'ai vu le rouge-gorge
Jouer à la guerre
Avec l'écureuil roux
Pour un croûton de pain perdu
Le roitelet de Raimbaut chante
Encore devant ma porte
J'ai même entendu chanter
Un mésange sous la neige
Pour un tardif printemps
Toutes les odyssées de l'esprit et de l'amour
Nous attendent à chaque tournant
De la route encore
Ma Reine combattante, suis fier de toi, mais
S'il te plaît, quand la folie rôde,
Quand la rage suinte des égouts des Métropoles,
Marche délicatement dans la grotte des cyclopes
Alors qu'à nouveau pour trop de gens sur terre
L'heure est là où la pitié est un déshonneur
Merci Pier Paulo Pasolini
Ta liberté est sous ma main
Ma liberté est sous la tienne
Tu m'as confié cette sacrée charge
Un soir au tournant de la rue des Nations
Et de la rue de la Fraternité
Alors que tu partais à nouveau
Vers ton dilemme central
A moins que cela n'ait été
Qu'un moment de panique
(Mais tu me l'as bien répété
Deux ou trois fois)
Que mes paroles te laissent
Cette marque indélébile
Celle de l'amour pur, du désintéressement
Pour autant que cela soit possible
Dans ce temps de globalisation
Merci, merci Anthony Giddens
Même si je doute de la Troisième Voie
Mets moi comme un sceau sur ton bras
Car les grandes eaux n'éteignent pas l'amour
L'amour est plus fort que le Schéol
Tu dois l'avoir écrit quelque part sur toi
Comme un water mark sur la hanche
(Rien n'est plus beau
Qu'un printemps contrarié)
Cela fait au moins deux jours entiers
Que je ne me suis pas plongé
Dans les eaux vives de ta voix
You are tree, you are dance,
You are light, you are river
A cool wind is blowing
Exposés sur les montagnes
Séparées du coeur
Notre plaisir partagé
Souffle à travers moi
Comme un vent frais
Qu'en est-il advenu de l'irénisme forcené
Du projet de la Route de la Soie
Sorrow Love Song
Merci Kubilaï Khan Investigation
C'est peut-être le moment de t'en prévaloir
Nous sommes toujours en route
Vers la Grande Transformation
Vers les plus anciens plateaux
Hûrquâlyâ la terre du coeur
Purgée de l'antique malédiction
Purgée de l'aveuglement ancien
Qu'avons-nous cherché
Sur nos routes déviantes
Qu'avons-nous partout cherché
Dans l'excès et la perdition
Qu'avons-nous cherché
Dans l'errance et la folie
Une terre habitable en poésie
Le recouvrement de l'honneur
A la barbe des spoliateurs
Des soldeurs et des liquidateurs
-- Le moment du retournement
N'est-ce pas ce moment de la fin
D'une logique de criquets, de dévoration?
Où sont les hommes et les femmes de paix
Capables de s'élever au delà d'eux-mêmes
A l'universelle unidiversité?
Pourquoi tout projet commun
Est-il devenu impossible?
Qu'est-ce qui a fait des fils de l'homme
Le pire des parasites, l'ennemi des espèces
Un fléau pour cette terre?
Celui qui souille, qui empeste
Ce qui élevait encore le regard
Ce qui échappait encore
La vie clandestine de la terre
Le cygne le col vert l'oie de Sibérie
Le vol libre du peuple des oiseaux
Libres concitoyens des vents de la lumière
Pourquoi fait-on encore semblant de croire
Que le merdique Marché à lui seul
Peut sauver l'humanité
Alors que visiblement
Il ne fait que travailler dans le sens
De la perpétuation
Des intérêts de quelques uns?
Voudrait-on encore nous inculquer
La fable commode de la chute de l'Homme
On ne s'y prendrait pas autrement
La fréquentation des machines
Ne tire-t-elle pas l'humain
Vers l'abstraction toujours davantage?
Est-ce une guerre contre l'Occident
Ou contre la Modernité,
(Qui a bon dos ),
Comme réalisation et comme projet?
(Moi aussi je me suis enfui
A toute jambe un jour
Devant l'épreuve
De la pensée moderne...)
Mais peut-il avoir émancipation
Sans transgression?
Et quand la transgression
Devient refus de la transgression,
L'horizon ne devient-il pas vraiment sombre,
L'avenir ne se mord-il pas la queue?
Une terre humaine
Doit bien encore exister
Quelque part à l'intérieur
De nos coeurs-corps
Ces chèvres du Rove
Sentent bon les origines
Elle proviennent à ce qu'il paraît
Du croisement d'une race de l'Himalaya
Et d'une race d'Anatolie
Il y a trois mille ans
Animal, c'est-à-dire humain
Merci Gilles Deleuze
A cette hauteur, c'est déjà
Une seule et même draille,
Une seule et même steppe
Ste Victoire, haut stèle élevé
A l'héroïsme de la Terre
Déclinaison ultime
De l'ombre et de la lumière
Ce sont là les rites
Les plus anciens de la terre
Les savoirs bafoués proscrits
Délaissés du coeur
Qui font retour
Les cérémonies de l'innocence
Qui nous ont constitués
Même entachées de rage
D'ignorance de scories
Mesura saber e sen
L'introduction de la monnaie, le mécanisme des prix,
N'a-t-il pas pris le risque d'acclimater
Un maximum d'inhumanité, de décimer
La fragile écologie humaine?
Merci Karl Polanyi
Humain, c'est-à-dire animal
Cela fait combien d'années déjà
Que ton musc ne m'a pas quitté
A heaven of forethought
Sleeps in your eyes
A nous deux, nous sommes
Un cerveau au carré,
Une faculté visionnaire
You have given a face
To the idea of harmony
Mais si je suis encore dans l'admiration
Devant ta fouffe de reine
Tes reins d'apsara
Devant ton accompagnement
Ta proximité ton acuité
La souveraine douceur
De ta complicité
Le suis bien davantage
(Cela, du moins, l'épreuve
Me l'a bien démontré)
Your eyes talk to mine
They speak the same language
E ieu t'escote dins teis uelhs
(Et je t'écoute dans les yeux)
J'aimerai bien retrouver le fil
De ce poème en ritournelle à peine né
Disparu depuis dans un sac à main
Un soir électrique de Vieux Port
Face à la Bonne Mère
Juste avant ton départ
Alors que je t'attendais en frissonnant
Transi sur cette terrasse vide
Quai d'Estienne d'Orves
En regardant s'enfuir les étourneaux
Par dessus les toits de la ville
A la recherche d'une gîte précaire
C'est alors qu'est tombé l'appel
De l'ami chanteur: Lo sol poder es que de dire
'A la fin de ta traduction, - Merci Jean-Marie Carlotti,
Je ne trouve pas le dernier vers: Merci Robert Lafont
E ieu t'escote dins teis uelhs
(Et je t'écoute dans les yeux)
Peux tu me le retraduire?
Ou est-ce intraduisible ?'
Alors que justement ce jour là
Tu m'avais montré le gris-bleu
Vraiment affolant de tes yeux
Comme si tu avais absorbé le ciel entier
Ou non plutôt l'ardoise de la mer
Presque radioactive
Tu as donc fait le voyage
Du 'Regard d'Ulysse' à l'envers
Quant à moi j'aurais bien eu besoin
Que tu m'écoutes dans les miens
E ieu t'escote dins teis uelhs
(Et je t'écoute dans les yeux)
That thine eyes talk to mine,
They have been known to speak the same tongue,
I mean, a common language,
J'aurais bien besoin de tes avis,
Il me manque pour le moins
D'une bonne moitié de cerveau,
Avec des décisions à prendre, à désapprendre,
Thine eyen will me sleyen soddenlye,
Their beauty I may not sosteyne,
Thinking with, wondering, enjoying still
Your freedom, enterprise, character Keep your eyes on the prize
Your paraplegic friend
Whose shadow has deserted him
To follow your footsteps
And guard yours
You are tree, you are dance, you are light, you are river,
A heaven of forethought sleeps in your eyes,
The gentleness of love flows up through your arms,
In one single gesture you have crossed the worlds,
Light and dark, the levels of becoming,
And disenchanted the spells of inhumanity...