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La République des Lettres

Abdelkébir Khatibi

Abdelkébir Khatibi
Triptyque de Rabat

La République des Lettres
ISBN 978-2-8249-0122-0
Livre numérique (format ePub)
Prix : 5 euros
Disponible chez • AmazoniTunes

Marguerite Duras

Marguerite Duras

Marguerite Duras, pseudonyme de Marguerite Donnadieu, est née le 4 avril 1914 à Gia Dinh, en Cochinchine (actuel Vietnam), où son père était professeur de mathématiques et sa mère institutrice.

Elle perd son père alors qu'elle a quatre ans. Sa mère, réduite avec ses trois enfants à l'existence d'une famille de blancs pauvres, achète une concession incultivable, inondée malgré ses efforts héroïques pour construire des barrages: c'est la ruine. Cet épisode marquera fortement l'oeuvre de Marguerite Duras, où l'on retrouve les tensions entre une mère névrotique, un frère aîné adonné à la drogue et à la violence et un frère cadet légèrement retardé mais que la jeune fille aime passionnément.
En 1932, elle quitte l'Indochine définitivement pour faire des études à Paris. Elle y rencontre Robert Antelme, qu'elle épousera en 1939, et Dionys Mascolo, dont elle aura un fils en 1947.

Marguerite Duras publie son premier roman, Les Impudents, en 1943, suivi de La Vie tranquille (1944), histoires de familles de province que l'on rapprochera des romans de François Mauriac. Elle les signe "Duras", du nom de la région où son père avait été propriétaire. En 1950, elle aborde pour la première fois le drame de son enfance dans Un barrage contre le Pacifique: à travers le portrait d'une famille dominée par la figure de la mère, ce roman rappelle la veine romanesque américaine par ses innovations techniques et exprime une sympathie marquée envers les opprimés du système colonial (René Clément en tirera un film).

Les quatre romans qui suivent: Le Marin de Gibraltar (1952), Les Petits Chevaux de Tarquinia (1953), Des journées entières dans les arbres (1954) et Le Square (1955) sont autant de tentatives vers un allégement radical des procédés narratifs. Dans Le Square, dialogue d'un homme d'un certain âge et d'une jeune nurse qui se rencontrent par hasard sur un banc, la rencontre est de courte durée et la signification de l'oeuvre reste floue. Moderato Cantabile (1958), qui établit définitivement la réputation de Marguerite Duras, accélère ce processus. La voix durassienne s'impose, avec ses ambivalences, ses silences et ses désirs perturbateurs.

C'est à cette époque qu'Alain Resnais lui demande d'écrire le scénario de Hiroshima mon amour. Tourné en 1960, le film connaît un grand succès et lui ouvre de nouvelles perspectives. Sa première oeuvre pour le théâtre, Les Viaducs de la Seine-et-Oise (1960), abordant le cas énigmatique d'un crime macabre, est publiée la même année. Le motif du crime restera très présent dans son oeuvre: on le retrouve dans un roman, L'Amante anglaise (1967), récit illustrant la manière de Marguerite Duras, sa façon de travailler le même matériau selon des formules narratives différentes.

Considérée en marge du Nouveau Roman, elle produit dans les années 1960 des récits et des pièces de théâtre où les éléments formels sont de plus en plus réduits. Les personnages y demeurent indéterminés et l'intrigue est remplacée par une orchestration répétitive de phrases, de détails et de motifs. Le silence, l'hésitation et la syntaxe hachée qui donne tout son poids au non-dit, deviennent des éléments caractéristiques.

Le Ravissement de Lol. V. Stein (1964) marque un nouveau tournant: le cas de Lol, dont l'équilibre chancelle lorsque son fiancé la quitte pour Anne-Marie Stretter, est présenté dans un style squelettique. Ce roman ouvre un cycle d'oeuvres qui ont entre elles des rapports étroits mais énigmatiques: Le Vice-Consul (1965), où le personnage d'A.-M. Stretter reparaît et celui d'une mendiante apparemment sans rapport avec elle; India Song (1973, texte et film), qui reprend la même histoire avec un dénouement différent; L'Amour (1971), récit fragmentaire dominé par la folie; et La Femme du Gange (1973), film et scénario tirés de L'Amour, et où revient l'histoire de Lol.

En 1965, trois pièces de Marguerite Duras sont publiées et jouées: une adaptation du Square; Les Eaux et forêts, comédie relevant d'une esthétique de l'absurde; La Musica, dialogue entre les deux partenaires d'un couple divorcé faisant le bilan de leur passé.

Les évènements de 1968 raniment les espérances révolutionnaires de Marguerite Duras, qui avait été membre du Parti Communiste Français de 1944 jusqu'à son exclusion en 1950. Les oeuvres publiées dans les années qui suivent reflètent cette thématique. Détruire, dit-elle (1969, texte et film) oppose la force subversive du désir aux conventions sociales; Nathalie Granger (1972, texte et film), récit consacré aux femmes, lie la violence des jeunes à leurs frustrations. Certains critiques, comme Marcelle Marini, ont vu dans l'oeuvre de Marguerite Duras un exemple de l'écriture féminine.; Les Parleuses (1974), où elle dialogue avec Xavière Gauthier, est en effet un texte ouvertement féministe. Mais bien que les femmes, leurs aliénations et leurs transgressions, soient au centre de ce qu'elle a écrit, il est tout aussi abusif de rattacher son oeuvre au féminisme qu'à n'importe quelle autre école.

Au cours des années 1970 et 1980, Marguerite Duras a continué à écrire des récits et à tourner des films, qui se répondent et se mettent mutuellement en question. Avec le temps, les liens entre l'oeuvre et la vie deviennent de plus en plus difficiles à démêler. Dans Les Lieux de Marguerite Duras (1977), on la voit passer sa vie en revue dans un dialogue avec Michelle Porte. À partir de 1980, son oeuvre est marquée par la présence de son compagnon, Yann Andréa. Dans L'Été 80 (1980), il regarde à côté de Marguerite Duras un enfant sur la plage; dans Yann Andréa Steiner (1992), elle raconte leur rencontre et leur vie commune. Lui-même produit en 1983 un M. D. qui rend compte de la cure de désintoxication alcoolique au cours de laquelle elle a failli mourir.

En retour, Marguerite Duras publie L'Amant (Prix Goncourt 1984), récit autobiographique qui remonte à son adolescence en Indochine et qui atteint enfin le grand public. Cependant, elle met en garde le lecteur: "L'histoire de ma vie n'existe pas", écrit-elle dans L'Amant de la Chine du Nord (1991), où elle reprend la même histoire d'une manière différente.

L'un de ses derniers textes, Écrire (1993), évoque ce qu'écrire a représenté pour elle, mais confesse une sorte d'échec: "Je peux dire ce que je veux, je ne trouverai jamais pourquoi on écrit et comment on n'écrit pas".

Marguerite Duras est morte à Paris le 3 mars 1996, à l'âge de 82 ans.

Copyright © Elizabeth Fallaize / La République des Lettres, Paris, dimanche 21 avril 2013. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.

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