Jorge Semprun

Jorge Semprun

Fils d'un diplomate républicain espagnol, petit-fils d'un Premier ministre du roi Alfonso XII, Jorge Semprun est né à Madrid (Espagne) le 10 décembre 1923.

De 1936 à 1939, pendant la Guerre d'Espagne, il suit sa famille en exil en Suisse, puis aux Pays-Bas où son père occupe un poste diplomatique pour la République espagnole.

En 1939, la guerre d'Espagne étant perdue, il arrive à Paris et intègre le lycée Henri IV puis La Sorbonne. "Madrid était tombée et j'étais seul, foudroyé", écrira-t-il plus tard dans Adieu, vive clarté... (1998) qui est, explique-t-il, "le récit de la découverte de l'adolescence et de l'exil, des mystères de Paris, du monde, de la féminité. Aussi, surtout sans doute, de l'appropriation de la langue française". Il dévore Charles Baudelaire, Arthur Rimbaud, Jean-Paul Sartre, Paul Nizan, André Malraux, Jean Giraudoux et Paludes d'André Gide. "S'approprier" la langue française lui permet "un enracinement dans l'universel". Face au français, dit-il, "j'étais séduit" mais "la langue espagnole ne cessa pas pour autant d'être mienne". "En somme, du point de vue de la langue, je ne devins pas français, mais bilingue", résume-t-il.

En 1942, Jorge Semprun s'engage dans la lutte communiste et la Résistance. Il connaît le maquis, qu'il évoque dans dans son premier roman, Le Grand Voyage (1963) et, de 1943 à 1945, la déportation au camp nazi de Buchenwald. Dans Quel beau dimanche ! (1980) et surtout dans L'écriture ou la vie (1994), il raconte sa mémoire douloureuse de cette période de sa vie et comment il lui a été impossible d'écrire à son retour de Buchenwald. En 1947, il a un fils, Jaime, avec la comédienne Loleh Bellon.

Membre du Comité central du Parti Communiste espagnol clandestin à partir de 1954, il lutte activement contre la dictature franquiste. Il est exclu du PC en 1964 pour "divergence de point de vue" et décide alors de se consacrer principalement à l'écriture. Après la mort de Franco et l'instauration de la démocratie en Espagne il occupe, de 1988 à 1991, le fauteuil de Ministre de la Culture du gouvernement socialiste de Felipe Gonzalez.

En 1996, Jorge Semprun est le premier étranger à siéger à l'Académie Goncourt. Une intronisation qui efface l'épisode malheureux de 1995, lorsqu'il avait posé sa candidature à l'Académie française avant de la retirer, des académiciens lui reprochant son passé communiste et sa nationalité espagnole.

Outre Quel beau dimanche ! (1980), L'écriture ou la vie (1994) et Adieu, vive clarté... (1998), Jorge Semprun est l'auteur de nombreux ouvrages comme entre autres La deuxième mort de Ramon Mercader (Prix Femina 1969), Autobiographie de Federico Sanchez (1978) et L'Algarabie (1981). Il a également écrit les scenarii de films comme Z (1968) et L'aveu (1970) de Costa-Gavras, interprétés par son ami Yves Montand. Une de ses pièces de théâtre, Le retour de Carola Neher (1998), est consacrée à l'une des actrices les plus en vue de l'Allemagne des années 20, chassée de son pays par le nazisme avant de disparaître dans le goulag stalinien. Entre fiction et autobiographie, son oeuvre toute entière est une méditation sur le totalitarisme et les ambiguïtés de l'engagement.

Jorge Semprun est mort à Paris le 7 juin 2011, à l'âge de 87 ans.

Copyright © Mélanie Wolfe / republique-des-lettres.fr, Paris, mercredi 3 août 2016. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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