République des Lettres

Winston Churchill

Des archives secrètes révèlent les intentions de Churchill à l'égard de Gandhi, De Gaulle, Hitler et Staline.

Des compte-rendus de réunions du cabinet de guerre anglais pendant la Seconde Guerre mondiale, datés de 1942 à 1945 et rendus publics seulement aujourd'hui après le délai légal de soixante ans, éclairent d'un jour nouveau les intentions de Winston Churchill. Selon ces notes prises par le secrétaire-adjoint du cabinet gouvernemental à la guerre, Norman Brook, le Premier ministre britannique ne cachait pas son admiration pour Staline et envisageait tout bonnement à l'époque de laisser mourir Gandhi en prison, de mettre De Gaulle aux arrêts et d'exécuter Hitler sur la chaise électrique, sans procès.
Charles de Gaulle, chef de la résistance française réfugié en Angleterre en 1940 est, dans la vision de Churchill, un homme "d'une ambition insensée" qui risque de gêner les négociations entre les Etats-Unis et le général Giraud, préféré des Américains. Il préconise de le mettre à l'écart des négociations, lui refuse en mars 1943 l'autorisation d'aller rendre visite aux forces françaises libres et ordonne même de "l'arrêter s'il cherche à partir". De Gaulle se plaint d'être traité en prisonnier de guerre en Angleterre. C'est le chef des travaillistes, le futur Premier ministre Clement Attlee, qui recommande un peu plus de prudence: "Ne mettez pas tous vos espoirs sur Giraud (...), Rappelez-vous que le nom de De Gaulle est associé en France à l'esprit de Résistance (...), Les vues des Etats-Unis ne sont pas fiables" (...), doit-il insister auprès d'un Churchill qui en 1945 encore affirme qu'il n'y a "aucun espoir de relations de confiance avec la France tant que nous ne serons pas débarrassés de De Gaulle". Petite revanche, élu Président de la République Française, Charles de Gaulle n'a pas manqué plus tard d'opposer par deux fois son veto à la candidature de la Grande-Bretagne au Marché Commun.
Selon les mêmes documents d'archives, Winston Churchill a en revanche une bien meilleure opinion de Staline. Le dirigeant soviétique qu'il a rencontré à Moscou en 1942 pour lui proposer une coopération militaire contre les allemands est à son avis "un grand homme, d'une grande sagacité".
Au sujet du Mahatma Gandhi, détenu en Inde par les anglais dès août 1942 après avoir appelé à la désobéissance civile et déclaré que l'Inde ne devait pas soutenir l'effort de guerre contre l'Allemagne si elle n'obtenait pas son indépendance, Churchill envisage de le laisser mourir s'il entame une grève de la faim. "Je le garde en prison et je le laisse faire ce qu'il veut", déclare-t-il en 1943. Les autorités britanniques très embarassées l'ont finalement relâché un an plus tard, en 1944, sur la base de principes humanitaires alors que sa santé déclinait gravement et qu'il était devenu une icône pour le peuple du sous-continent. Il est décédé en 1948, après avoir libéré l'Inde de la domination coloniale britannique.
Quant à Adolf Hitler, Churchill ne souhaitait pas qu'il soit soit jugé pour ses actes, mais prônait plutôt de l'éxécuter sommairement, sans procès, dès sa capture. "Si Hitler nous tombe entre les mains, il est clair que nous le mettrons à mort. Cet homme est le moteur du Mal. Il faut exécuter les principaux criminels comme des hors la loi", déclare-t-il en décembre 1942. Il suggère aussi de demander aux Etats-Unis une chaise électrique pour procéder à l'exécution. En 1945, vers la fin de la guerre, il estime qu'un procès d'Hitler "serait une farce. (...) Toutes sortes de complications apparaissent dès que vous admettez un procès équitable". Hitler s'est suicidé le 30 avril 1945 dans son bunker et les principaux dirigeants nazis ont été jugés entre novembre 1945 et octobre 1946 par le Tribunal de Nuremberg pour crimes contre l'humanité.
Sir Winston Churchill, (1874-1965), Sous-secrétaire aux Colonies (1906-1908), Ministre du Commerce (1908-1910), Premier lord de l'Amirauté (1911-1915), Chancelier de l'Échiquier (1924-1929), Premier ministre anglais de 1940 à 45 puis de 1951 à 54, symbolise la résistance anglaise aux forces de l'Axe durant la Seconde Guerre mondiale. Il garde un prestige considérable en raison de son action internationale pendant cette période et est encore considéré comme le plus grand homme britannique de tous les temps. Son oeuvre littéraire (My Early Life, Malborough,...) et notamment ses Mémoires de guerre publiés en plusieurs volumes entre 1948 et 1954, lui valurent le Prix Nobel de Littérature 1953.

La République des Lettres, dimanche 1er janvier 2006

 

 

 

 

 

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