"Mon existence ressemble à une succession de mots rayés jusqu'au sang, biffés jusqu'à la moelle. Au point que le papier sur lequel je les couche, sur lequel ils gisent, s'en trouve déchiré, troué par endroits", écrit Alexandre Diego Gary dès la première page de S. ou l'espérance de vie. Entre l'autobiographie, la thérapie et l'hommage, Alexandre Diego Gary -- fils de Romain Gary et Jean Seberg -- publie un premier roman sombre, dans lequel la douleur de vivre suinte à chaque ligne. Etre le "fils de" n'est pas toujours simple, mais les exemples prouvant qu'il est possible de se réaliser dans l'ombre de parents connus ne manquent pas. Ce n'est pas le cas d'Alexandre Diego Gary, qui eut à supporter très jeune le suicide de ses deux parents à un an d'intervalle. C'est par l'écriture que l'auteur cherche aujourd'hui à apaiser ses blessures. Mais si écrire un livre lui permet de réaliser un rêve d'enfant, il se sent néanmoins encore coupable de parler de ses morts. "Si je le pouvais, si cela ne m'empêchait pas de vivre, je préférerais ne rien dire, je préférerais ne pas, ne pas parler des absents, mais je les sens en souffrance, si je me tais (si je les tais ?), si je me tue", écrit-il. S. ou l'espérance de vie est un récit torturé et complexe, pas toujours facile à suivre, mais dont la sincérité et la poésie ne peuvent que toucher le lecteur.
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Alexandre Diego Gary, S. ou l'espérance de vie (Éditions Gallimard).