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La République des Lettres

Rainer Maria Rilke

Rainer Maria Rilke
Lettres à un jeune poète

La République des Lettres
ISBN 978-2-8249-0207-4
Livre numérique (format ePub)
Prix : 5 euros
Disponible chez • Fnac • Amazon • Kobo • iTunes

Israël / Palestine

Israël / Palestine

À la lumière de la récente offensive israélienne sur Gaza, remise dans le contexte historique des relations entre Israël et les Palestiniens, notamment depuis les accords d'Oslo (1993), cet article s'interroge sur les objectifs stratégiques réellement poursuivis par Israël et sur leurs conséquences pour les perspectives de résolution du conflit israélo-palestinien.

      § ATTAQUE ISRAÉLIENNE SUR GAZA : LA QUESTION PRÉALABLE DE LA RESPONSABILITÉ

• La rupture de la trêve

Alors que la propagande israélienne tente depuis le déclenchement de l'opération militaire sur Gaza d'en faire porter la responsabilité au Hamas, pour cause de tirs de roquettes sur Israël, la vérité est bien différente, sinon opposée, et en tout cas facilement vérifiable pour qui veut bien s'en donner la peine.

La thèse de la responsabilité du Hamas est le plus souvent relayée, soit en considérant, à la façon de l'administration de George W. Bush, qu'Israël est en perpétuelle situation de légitime défense, soit en renvoyant au minimum dos-à-dos les parties palestinienne et israélienne. Or, comme le rappelle Mustapha Cherif, "pour tous les analystes objectifs, un fait fondamental doit être gardé en vue quelle que soit la divergence des opinions : dans cette guerre qui bafoue tous les principes, il y a un agressé et un agresseur, un colonisé et un colonisateur, un opprimé et un oppresseur (1). Toute confusion et renvoi dos à dos des protagonistes sont une imposture". Pour le ministre Bernard Kouchner notamment, ce sont bien les tirs de roquettes du Hamas qui sont responsables de la rupture de la trêve de 6 mois qui avait été négociée sous les auspices de l'Egypte et avait débuté en juin 2008.

La réalité est que la trêve, respectée par le Hamas depuis sa signature en juin 2008, a été rompue le 4 novembre 2008 par Israël qui a mené, sans qu'il s'agisse de quelconques "représailles", une attaque meurtrière sur Gaza. La date de l'attaque coïncidait parfaitement avec l'élection présidentielle américaine. Cette attaque, qui a fait 7 morts parmi les Palestiniens n'a fait l'objet d'aucune condamnation internationale (2), contrairement aux tirs de roquettes, qui en comparaison (et par rapport à la puissance d'Israël) ne sont que des "piqûres de moustiques".

Cette rupture de la trêve visait à entraîner une reprise des hostilités par le Hamas, afin de pouvoir justifier l'opération militaire contre Gaza (ou à tout le moins rendait cette reprise des hostilités extrêmement probable). Il est d'ailleurs extrêmement symptomatique que l'offensive se soit achevée, par un cessez-le feu unilatéral israélien, la veille de l'investiture de Barack Obama. Israël a fait en sorte de mener son offensive meurtrière pendant la quasi vacance du pouvoir aux Etats-Unis, afin de limiter au maximum les possibles pressions internationales liées à son attaque sur Gaza. Cela favorisait les possibilités de massacres et de destructions systématiques des infrastructures civiles.

Avant de discuter les politiques et stratégies d'Israël, la question qui se pose est la suivante : si les Israéliens ont organisé la rupture de la trêve de façon à en rendre médiatiquement le Hamas responsable, pourquoi les dirigeants du Hamas, que l'on dit (au-delà des slogans) raisonnés et même pragmatiques, sont-ils tombés dans le piège ?

• Le blocus de Gaza, acte de guerre

Dès après l'attaque israélienne sur Gaza les responsables du Hamas ont déclaré que la trêve avec Israël ne serait pas prolongée au delà des six mois prévus.

Et au terme des six mois, les tirs de roquettes ont repris, la suite est connue. Pourquoi cette reprise dans des conditions militaires aussi défavorables ? En fait, le rapport de force était si déséquilibré entre une organisation de type milice, sous équipée et sous armée, malgré la prétendue "contrebande d'armes" de l'Egypte vers Gaza -- comme si seul Israël avait le droit d'avoir des armes et de les utiliser -- qu'on ne peut parler de "guerre" mais plutôt de massacres (voir sur ce point l'article de Reuven Pedatzur, "The war that wasn't", dans le quotidien Haaretz du 25/01/2009, qui estime notamment : "Les combattants du Hamas n'ont même pas tenté de stopper les soldats israéliens qui pénétraient dans la bande de Gaza, optant pour un retrait sans le moindre combat. (...) Ce n'est pas une guerre. Ce n'est pas même une réellement une bataille.")

Si le Hamas a tiré des roquettes sur Israël, il y a au moins deux raisons à cela. Une trêve ne peut être maintenue unilatéralement, on ne peut faire la trêve pendant que l'autre partie mène contre vous des opérations de guerre (attaque israélienne du 4 novembre). Mais plus globalement le statu quo de la situation à Gaza apparaissait intenable.

Au boycott international du Hamas après sa victoire législative de 2006 (sur le principe : organisez des élections libres mais n'élisez pas n'importe qui), le blocus israélien a fait sombrer la bande de Gaza, ce minuscule territoire, le plus densément peuplé au monde, dans une situation économique, humanitaire et sanitaire insupportable.

Qu'on comprenne bien ce qu'est le blocus israélien. On pourrait se dire : Israël a bien le droit de fermer sa frontière avec la bande de Gaza... Ce qui serait méconnaître le fait que le bouclage des frontières s'accompagne d'un blocus maritime de la bande de Gaza par la marine de guerre israélienne (sans lequel il n'y aurait pas de blocus global). Si on ajoute à cela que le port de Gaza, et surtout l'aéroport (tous deux financés par l'Europe) ont été détruits par l'aviation israélienne en 2001 et 2002, on comprend alors ce qu'est réellement Gaza : une prison à ciel ouvert, un ghetto où s'entassent, dans des conditions épouvantables, 1,5 million de Palestiniens.

Au regard du droit international, un blocus est un acte de guerre. C'est pour cela que le Hamas pose comme condition à l'arrêt durable des tirs de roquettes, la fin du blocus de Gaza, dont son blocus naval.

Plutôt que d'être "tombés dans un piège", les dirigeants du Hamas ont plutôt commis, dans leur optique, une erreur tactique. Ils ont vraisemblablement considéré qu'il était de leur intérêt de mener la trêve jusqu'à son terme normal, sans répondre à l'attaque israélienne, mais en expliquant que du fait de cette attaque la trêve ne serait pas reconduite. Le délai entre l'attaque israélienne et la reprise des tirs de roquette a permis aux Israéliens de faire porter sur le Hamas la responsabilité de la rupture de la trêve. Cette vision a ensuite été relayée dans les médias occidentaux, parfois avec complaisance, parfois avec bonne foi, comme une reprise du discours dominant.

Le discours israélien est ensuite devenu, globalement : nous sommes en état de légitime défense, nous sommes forcés de faire cette guerre, il y aura des victimes civiles aussi inévitables que regrettables, mais c'est une guerre "juste" (3).

      § POUR QUELLES RAISONS L'OFFENSIVE SUR GAZA A-T-ELLE ÉTÉ DÉCIDÉE ET MENÉE ?

La "fenêtre de tir" qu'a constitué l'intervalle entre l'élection américaine et l'investiture du nouveau président n'est pas une raison suffisante en soi pour expliquer l'offensive israélienne. Cette offensive était motivée par au minimum trois raisons : une raison de court terme et de politique intérieure, une raison stratégique de moyen-long terme liée aux EU et une raison stratégique de long terme concernant le renforcement subi ou voulu du Hamas.

• Le contexte électoral

La première raison tient simplement à l'approche des élections législatives israéliennes (février 2009). Les sondages n'étaient pas favorables à la coalition au pouvoir mais plaçaient favori le Likoud de Benyamin Netanyahou. La coalition au pouvoir était alors menée par le Premier ministre Ehoud Olmert, tant empêtré dans des scandales politiques de corruption et d'enrichissement personnel qu'il avait annoncé depuis déjà plusieurs mois sa retraite politique. Ceux qui avaient un intérêt politique à la guerre (traditionnel effet de "rally round the flag" étaient Tzipi Livni, membre de Kadima (comme Olmert), ancienne du Mossad, ministre des Affaires étrangères et largement perçue en Israël comme l'héritière d'Ariel Sharon, et Ehud Barak, leader du parti travailliste, ancien chef d'état major de l'armée israélienne, ancien premier ministre et alors ministre de la Défense.

Le calcul était à l'évidence que l'attaque sur Gaza démonterait la fermeté de Livni et (surtout) Barak face à un Netanyhaou perçu comme plus à droite et plus sécuritaire.

Pour aussi cynique qu'il puisse être ce calcul est cependant très classique. Ainsi Shimon Pérès, perçu comme un grand pacifiste israélien en Occident, avait en 1996 lancé l'opération "Raisins de la colère" au Liban, dans l'espoir que la fermeté manifestée lui permettrait de gagner les élections législatives et de conserver son fauteuil de premier ministre (qu'il occupait depuis 1995, à la suite de l'assassinat de Yitzhak Rabin par un extrémiste juif). Cette attaque sur le Liban, qui avait entraîné plus de 500 000 réfugiés fuyant les combats entre le Hezbollah et l'armée israélienne, avait cessé sous la pression internationale après que l'artillerie israélienne eut tué une centaine de civils réfugiés dans le village de Cana.

En 2000, toujours dans le contexte préélectoral des législatives c'est la visite provocatrice d'Ariel Sharon sur l'esplanade des Mosquées (dans la partie arabe de Jérusalem) qui avait déclenché la deuxième Intifada et la répression israélienne extrêmement violente avec son cortège de souffrances.

En Israël les cycles électoraux rythment ainsi souvent les opérations militaires.

Barak étant ministre de la Défense, mais aussi le candidat le plus mal classé dans les sondages, derrière Netanyahou et Livni, il avait le moins à perdre et le plus à gagner à la guerre contre Gaza, que les médias israéliens ont régulièrement décrite comme "la guerre de Barak".

Notons d'ailleurs que la présentation de Netanyahou comme un candidat de l'ultra droite en regard de Barak et Livni qui seraient modérés est un leurre. Selon les standards des démocraties occidentales les trois candidats seraient considérés comme d'extrême droite, tant le spectre politique israélien est décalé vers la droite. Voir sur ce point l'article de Gideon Levy, "No moderate left", dans Haaret'z (25.01.09) qui estime : "Tzipi Livni et Ehud Barak sont partis en guerre à Gaza et sont donc aussi radicaux qu'on peut l'être. Benjamin Netanyahou est plus radical uniquement sur un plan rhétorique. Nous ne devons pas nous leurrer dans cette campagne électorale et considérer tant Livni que Barak comme des modérés, par contraste avec l'extrêmiste Netanyahou. C'est une tromperie. Kadima et le parti travailliste, les partis du centre et de la gauche, ont entraîné Israël dans deux guerres terribles en deux ans."

• L'élection présidentielle américaine

La deuxième raison est liée à l'arrivée au pouvoir d'un nouveau président américain. L'administration de G. Bush a été celle du soutien inconditionnel à Israël, démontrant des records de partialité et pratiquant la politique du deux poids et deux mesures à un degré encore jamais atteint (politique selon laquelle, notamment mais de façon emblématique, une roquette artisanale tirée sur Israël est un acte terroriste inadmissible, tandis qu'un bombardement du territoire palestinien par des F16 israéliens est légitime et normal (4)).

L'alliance entre les Etats-Unis et Israël est ancienne (on peut considérer que c'est à la fin des années 1960 que les Etats-Unis deviennent le principal allié d'Israël). Historiquement, cette alliance participait de la Guerre froide ; la Syrie et l'Egypte étant alliées de l'URSS (jusqu'aux années 1970 pour l'Egypte, au-delà pour la Syrie), Israël était le pion américain implanté au Proche-Orient. Après la révolution iranienne, Israël a également pu apparaître comme un contrepoids à l'influence grandissante de l'Iran ; après le 11 septembre Israël s'est habilement rangé dans le camp américain de la guerre contre le terrorisme.

Cette alliance n'est cependant pas qu'une convergence d'intérêts. Au contraire, la politique d'Israël, expansionniste et guerrière (colonisation, guerre du Liban, guerre de Gaza), est un facteur permanent de déstabilisation régionale, qui ne peut objectivement apparaître comme favorisant les intérêts américains (qui, au Proche-Orient, se limitent à la garantie d'approvisionnements réguliers en pétrole (5)). En réalité les relations Israël-Etats-Unis sont plus complexes qu'elles ne semblent. Les Etats-Unis sont soumis à l'influence d'Israël sur leur scène politique intérieure (cf. note numéro 5) et sont pénalisés par leurs cycles électoraux courts (une élection nationale majeure tous les deux ans).

Quelle que doive être la politique du nouveau président américain, et sans se faire d'illusion sur ses réelles marges de manoeuvre vis-à-vis d'Israël (6), elle ne pourra plus être aussi déséquilibrée en faveur d'Israël. Les responsables israéliens (la classe dirigeante militaro-politique) ont des raisons d'être soucieux. Que se passerait-il si le nouveau président décidait de mettre en place des pressions envers Israël en faveur d'un réel processus de paix ? Pour éviter cela (cf. infra. la troisième raison), quoi de mieux qu'une opération militaire de grande ampleur, détruisant quasiment toutes les infrastructures civiles qui ne l'avaient pas encore été, pour éloigner durablement les perspectives de paix ?

C'est ainsi que l'action diplomatique américaine peut être paralysée à l'avance et permettre le maintien d'un statu quo ultra favorable à Israël. Et pour le moment, c'est ce qui s'annonce. L'envoyé spécial du président Obama, Mitchel, va se focaliser sur la consolidation de la trêve entre le Hamas et Israël (ce qui ne règle rien). Les Américains voudront ensuite promouvoir des arrangements de sécurité, peut-être un échange de prisonniers, la réouverture des points de passage de Gaza et la reconstruction du territoire dévasté. C'est-à-dire que ne sera traité aucun problème de fond (problèmes qui ne peuvent de toute façon pas être abordés sans reconnaître le Hamas comme interlocuteur (7)).

Ainsi, selon l'ancien négociateur américain au Proche-Orient Aaron David (cité par Alistair Lyon (8)) Barack Obama n'a pas l'intention de procéder à des inflexions majeures de la politique proche-orientale américaine car les perspectives d'aboutir à un quelconque règlement entre Palestiniens et Israéliens "sont infimes, sinon nulles". Pourtant, selon Alistair Lyon, "le blitz d'Israël à Gaza met en demeure les Etats-Unis de faire quelque chose rapidement. Ils risquent donc de se retrouver durant des mois empêtrés dans des efforts visant simplement à gérer la crise plutôt que dans la recherche d'une solution globale introuvable".

• Le renforcement du Hamas ?

L'objectif officiel de l'opération "Plomb durci" était d'apporter la sécurité aux habitants du Néguev. D'un point de vue technique, était-ce un objectif crédible ? L'histoire récente d'Israël est à ce titre instructive.

En juin 1982, officiellement afin de protéger le Nord d'Israël de l'artillerie de l'OLP, l'armée israélienne envahit le Liban, dresse le siège de Beyrouth, bombarde la ville, où se trouvent Arafat et les combattants de l'OLP, pendant des semaines.

Au terme de deux mois de conflit, Arafat et ses combattants quittent Beyrouth sous protection de la marine de guerre française. Les camps de réfugiés palestiniens (réfugiés de 1948, chassés par la création de l'Etat d'Israël) sont laissés sans défense. Le 16 septembre 1982, l'armée israélienne entre à Beyrouth-Ouest. Il s'ensuit le massacre de Palestiniens par des milices chrétiennes dans les camps de Sabra et Chatila, sous les yeux de l'armée israélienne qui les laisse faire. Le bilan est de 800 morts selon la commission d'enquête israélienne et de plus de 1 500 selon l'OLP (femmes, enfants et vieillards puisque les combattants ont dû partir). Une commission d'enquête israélienne, au terme de quatre mois de travaux, estimera que "le ministre de la Défense (Ariel Sharon) porte une responsabilité personnelle" dans les massacres des camps. Ariel Sharon démissionne.

Cette guerre de deux mois marque aussi l'envoi de combattants iraniens au Liban pour venir en aide aux Palestiniens. L'OLP et Arafat partis pour Tunis, les Iraniens restent. C'est la naissance du Hezbollah ; la suite est connue pour Israël.

Le 1er octobre 1985, l'aviation israélienne attaque la capitale tunisienne et bombarde le quartier général de l'OLP à Tunis. L'objectif est de porter enfin un coup fatal à l'OLP et au mouvement national palestinien en tuant Arafat. L'attaque fait 65 morts. Deux ans plus tard la première Intifada est lancée en Cisjordanie ; fin 1987 le Hamas, émanation des Frères musulmans, est créé avec l'assentiment de la direction israélienne qui y voit un contrepoids à Yasser Arafat.

En février-mars 1996, en représailles à l'assassinat par les services secrets israéliens de Yehia Ayache ("l'ingénieur du Hamas", spécialiste de la fabrication des engins explosifs) dans l'objectif officiel d'empêcher des attentats, le Hamas déclenche une campagne d'attentats qui font plus de 100 morts dans plusieurs villes d'Israël et déstabilisent le gouvernement Pérès.

En mars 2002, Israël lance en Cisjordanie l'opération "Rempart". Toutes les localités importantes sont réoccupées. A Ramallah, la Mouqata, siège de la présidence de l'Autorité palestinienne où se trouve le Président Arafat est assiégée par les chars israéliens. En avril 2002, une incursion de l'infanterie et des blindés israéliens dans le camp de réfugiés de Jenine provoque la mort de 53 Palestiniens et 15 soldats israéliens. "Rempart" est suivi de l'opération "Voie ferme", deux mois plus tard. Résultat : ces opérations visant officiellement à prévenir des attaques furent suivies de multiples attentats du Hamas, qui ont fait de 2002 et 2003 des années sanglantes pour les populations civiles en Israël (293 morts).

Que dire de "Arc-en-ciel", en mai 2004 ? "Jours de pénitence", quatre mois plus tard, au nord de la bande de Gaza, avec les mêmes sinistres bilans ? "Les assassinats de dirigeants politiques du Hamas exécutés et revendiqués sans complexe par le pouvoir israélien ? Les attentats-suicides ont culminé en 2005. Et, au début de l'année suivante, le Hamas obtenait la majorité absolue aux élections législatives" (9).

En juin 2006, au cours d'une attaque dans le sud de la bande de Gaza, des combattants palestiniens capturent le soldat israélien Gilad Shalit, lors d'une opération armée israélienne à la lisière de Gaza, déclenchant une offensive israélienne dans la bande de Gaza ("Pluie d'été"). Mais plus de deux ans après, Shalit est toujours prisonnier du Hamas.

"Et que dire de la guerre au Liban, en juillet-août 2006, avec, à la clé, un pays dévasté et plus de 1 000 morts civils dont 30% d'enfants ? Là encore, Israël a détruit pour rien. Son butin ? L'échange, en juillet 2008, de deux dépouilles mortelles de soldats israéliens d'un côté, contre cinq détenus et des dizaines de dépouilles mortelles libanaises et palestiniennes de l'autre" (10).

(Notons que la guerre du Liban de 2006 démontre aussi que l'impunité dont jouit Israël auprès de la Communauté internationale ne se limite pas à ses actions contre les Palestiniens (11).)

Les faits, remis en perspective chronologique, parlent d'eux-mêmes : aussi coûteuses qu'elles soient en vies palestiniennes ou libanaises, les offensives israéliennes n'ont jamais permis d'atteindre les objectifs tactiques ou stratégiques affichés.

On peut se tromper une fois, deux fois, mais pas tout le temps (surtout quand on se targue par ailleurs de posséder le meilleur service de renseignements du monde).

Comment croire alors que l'objectif de "Plomb durci" était d'éradiquer le Hamas ? Et dans ce cas quel était l'objectif stratégique de long terme ?

Un tel objectif existe-t-il ? Le fait que tous les responsables israéliens (pour résumer : la classe militaro-politique qui dirige le pays) étaient favorables ou enthousiastes à l'attaque sur Gaza accrédite cette idée. Ceci car ils ont (au moins les politiciens) des objectifs électoraux de court terme antagonistes. On pourrait se dire que Barak voulait montrer sa dureté à l'électorat, qu'Olmert n'était plus vraiment concerné (sauf à vouloir effacer pour lui-même l'échec de 2006 contre le Hezbollah par une victoire facile contre le Hamas) que les autres (Livni, Nétanyahou) étaient obligés de suivre pour ne pas être accusés de mollesse avant les élections. Mais comment expliquer que TOUS les responsables israéliens aient soutenu l'offensive (le Président Péres, vrai faux pacifiste, tombant totalement le masque) ? Car l'hypothèse de la naïveté ne peut être de mise : ces dirigeants savent tous que les roquettes du Hamas étaient un prétexte et que c'est Israël (Barak) qui a rompu la trêve (4 novembre 2008, cf. supra).

Il y a donc un autre objectif, bien plus important (car sciemment camouflé derrière l'objectif irréaliste d'éradication du Hamas).

Nous faisons ici l'hypothèse (argumentée) que le réel objectif stratégique de "plomb durci" loin de l'éradication du Hamas était en réalité son renforcement politique, pour briser le mouvement national palestinien.

La nature des destructions à Gaza accrédite cette hypothèse.

Selon Salah Abdel-Jawad, professeur d'histoire à l'université de Bir Zeït (cité par Le Monde) : "Il ne s'agit pas simplement de détruire tel ou tel mouvement politique. Sinon pourquoi bombarder les ministères, l'Université islamique et l'Ecole américaine de Gaza ? Tout comme le saccage des bâtiments publics opéré en 2002, lors de l'invasion de la Cisjordanie, ces actions participent d'un plan concerté. Il vise à détruire non seulement l'entité politique palestinienne mais aussi et surtout la société. L'objectif est de créer une forme de résignation, d'amertume, d'imposer une violence quotidienne, que les Palestiniens finissent un jour par retourner contre eux.

Et puis il y a une autre théorie. Elle dit qu'Israël cherche à renforcer le Hamas, à développer une situation où non seulement la bande de Gaza mais aussi la Cisjordanie seraient sous sa domination. Bien sûr, militairement, le Hamas sera défait. Le rapport de force est intenable. Mais à moins que l'armée israélienne n'écrase complètement les islamistes, ceux-ci devraient émerger de l'attaque avec une audience accrue. A Gaza comme en Cisjordanie." (12)

Afin de comprendre le pourquoi d'une stratégie israélienne de renforcement du Hamas, il faut revenir à la création du Hamas et analyser la chronologie du "processus de paix".

      § QUE VEUT RÉELLEMENT ISRAËL ?

• Les grandes étapes du "processus de paix"

Le 30 octobre 1991, les présidents américain et soviétique George Bush et Mikhaïl Gorbatchev ouvrent la conférence de paix de Madrid. Le 3 novembre 1991 débutent les négociations bilatérales entre Israël et les délégations syrienne, libanaise et jordano-palestinienne.

En janvier 1993 débutent les négociations secrètes d'Oslo entre une délégation palestinienne une délégation israélienne.

Le 13 septembre 1993, les Accords d'Oslo sont signés à Washington en présence de Yitzhak Rabin, premier ministre israélien, de Yasser Arafat, président du comité exécutif de l'OLP et de Bill Clinton, président des Etats-Unis. Ces Accords consistent en une Déclaration de principes, qui est basée sur la reconnaissance mutuelle entre les deux parties.

En mai 1994 débute la période d'autonomie fixée à cinq ans. C'est la phase "Gaza et Jéricho d'abord". Le principe de l'autonomie est étendu en septembre 1995 à l'ensemble de la Cisjordanie (accords du 28 septembre 1995, dits "Oslo II").

Pendant les années suivantes, les négociations se poursuivent, le contrôle administratif de la Palestine est progressivement et partiellement transféré à l'autorité palestinienne (dont Yasser Arafat a été élu Président en janvier 1996 (13)).

La mise en place de l'autonomie est prévue pour se faire par étapes, en divisant le territoire palestinien en une multitude de zones à statuts différents et évolutifs : les zones A seront sous contrôle palestinien, les zones B sous contrôle conjoint palestinien-israélien et les zones C seront sous contrôle exclusif israélien.

Le 23 octobre 1998, l'accord de Wye River est signé aux Etats-Unis entre Yasser Arafat et Benyamin Netanyahou, premier ministre israélien, l'accord stipule que l'Autorité palestinienne doit obtenir dans les trois mois 13% supplémentaires du territoire de la Cisjordanie (dont 1% en pleine souveraineté -- zone A -- et 12% en souveraineté partagée avec les Israéliens -- zone B) en échange d'une répression accrue de la part de la police palestinienne des mouvements islamistes.

Le 18 décembre 1999 les Israéliens suspendent l'application de l'accord de Wye River.

Le 4 septembre 1999 est signé l'accord de Charm el-Cheikh entre Yasser Arafat et Ehud Barak, premier ministre ; cet accord redéfinit le calendrier d'application des accords de Wye River pour le retrait supplémentaire de l'armée israélienne, l'ouverture de deux "passages sûrs" entre la bande de Gaza et la Cisjordanie, la libération de prisonniers supplémentaires et l'accord définitif sur les questions restées en suspens, qui doit être conclu au plus tard le 13 septembre 2000. Le contrôle exclusif israélien sur la Cisjordanie doit être ramené de 72% à 59% du territoire.

En pratique les transferts seront les suivants :

Septembre 1999: transfert de 7% de la Cisjordanie de la zone C (contrôle exclusif israélien) en zone B (contrôle israélo-palestinien partagé).

Au terme de ce premier retrait la répartition entre les zones est la suivante:

      • zone A : 9,1%

      • zone B : 27,9%

      • zone C : 63%

Novembre 1999: transfert de 2% de la Cisjordanie de la zone B en zone A (contrôle exclusif palestinien) et 3% de la zone C en zone B.

Au terme de ce deuxième retrait la répartition entre les zones est la suivante (14):

      • zone A : 11,1%

      • zone B : 28,9%

      • zone C : 60%

Janvier 2000 : transfert de 1% de la Cisjordanie en zone C à la zone A et 5,1% de la zone B en zone A.

Au terme de ce troisième retrait la répartition entre les zones est la suivante :

      • zone A : 17,2%

      • zone B : 23,8%

      • zone C : 59%

En juillet 2000 les négociations de Camp David, entre Yasser Arafat et Ehud Barak, sous le parrainage de Bill Clinton se soldent par un échec en raison de positions inconciliables concernant le statut final de Jérusalem (dont les Palestiniens revendiquent la partie arabe pour former la capitale de leur Etat, conformément aux résolutions de l'ONU, alors que les Israéliens revendiquent la totalité de Jérusalem comme capitale d'Israël (15)) et concernant le droit au retour des réfugiés palestiniens de 1948 (création d'Israël) et 1967 (Guerre des six jours et occupation de la Cisjordanie et Jérusalem-Est).

En novembre 2000 le premier ministre israélien Ehud Barak décide la construction d'une « barrière » le long d'une partie de la Ligne verte (qui sépare la Cisjordanie d'Israël), au nord et au centre de la Cisjordanie, pour empêcher le passage des véhicules (ce qui deviendra la "barrière de sécurité" pour les Israéliens, le "mur de l'annexion" pour les Palestiniens (16)). Cette construction est totalement illégale au regard du droit international, sans que la reconnaissance de cette illégalité, déclarée par la Cour internationale de justice et l'ONU, soit pour autant suivie du moindre effet (17).

En mars 2002 Israël lance en Cisjordanie l'opération "Rempart". Toutes les localités importantes sont réoccupées.

En octobre 2002 sont lancés les travaux de construction du Mur entre Israël et la Palestine. Contrairement à ce qu'on peut penser, ce mur n'est pas construit sur la frontière de 1967, il est construit à l'Est de cette frontière, c'est-à-dire uniquement en territoire palestinien, dont une frange se trouve de fait annexée à Israël ; Jérusalem est englobée dans cette frange, c'est-à-dire coupée du reste de la Palestine. Des localités se trouvent totalement enclavées car entourées par la barrière (comme Kalkilya au Nord -- cf. carte de la colonisation infra) et deviennent de fait des prisons. Les régions de Jénine, Tulkarem et Kalkilya deviennent des "zones militaires fermées" (c'est-à-dire globalement interdites à tout le monde sauf à l'armée israélienne et notamment aux journalistes) ; leur principe est totalement illégal au regard des conventions internationales puisque, par définition, les civils se voient interdire de quitter les lieux des combats.

En avril 2003 est publiée la Feuille de route élaborée par le "quartet" (Etats-Unis, Union européenne, Nations unies, Russie). Elle prévoit que les Palestiniens renoncent aux attentats contre Israël et qu'Israël reconnaisse la Palestine comme un État autonome.

En mars 2004 le fondateur du Hamas, cheikh Ahmed Yassine, est assassiné par l'armée israélienne. En novembre 2004, Yasser Arafat meurt à Paris d'une maladie du sang non élucidée. Deux mois plus tard, Mahmoud Abbas, le candidat du Fatah est élu à la présidence de l'Autorité Palestinienne.

De août à septembre 2005 l'armée israélienne évacue unilatéralement les colonies de Gaza. La plus grande partie des colons quittant Gaza s'installe en Cisjordanie (le désengagement facilitant l'extension de la colonisation ; selon l'expression, devenue célèbre, de Dov Weisglass, chef de cabinet du Premier ministre d'alors, Ariel Sharon: "Le désengagement fournit la dose de formol nécessaire pour qu'il n'y ait pas de processus politique avec les Palestiniens" (18)).

En janvier 2006, le Hamas remporte les élections législatives palestiniennes ; l'ONU salue la transparence des élections palestiniennes. Trois mois plus tard, l'Union européenne suspend ses aides au gouvernement palestinien que dirige Ismaïl Haniyeh, du Hamas.

En juin 2007, le Hamas évince militairement le Fatah du pouvoir à Gaza ; Mahmoud Abbas démet le Premier Ministre Ismaïl Haniyeh de ses fonctions et crée, à Ramallah, un gouvernement d'urgence dirigée par Salam Fayyad (économiste, réputé proche des Américains). Le blocus israélien de Gaza se met en place.

En novembre 2007 des pourparlers israélo-palestiniens se tiennent à Annapolis, aux Etats-Unis, sous l'égide du Quartet, afin de parvenir à la signature d'un accord de paix incluant la création d'un Etat palestinien d'ici fin 2008.

Le 19 juin 2008 entre en vigueur une trêve des violences Hamas/Israël de six mois, négociée par l'Egypte

Le 4 novembre 2008 une opération militaire israélienne à Gaza tue sept Palestiniens. Le Hamas annonce qu'en conséquence il ne renouvellera pas la trêve. Un mois plus tard, au terme des six mois négociés par l'Egypte, le Hamas déclenche des tirs de roquettes artisanales sur Israël.

Le 27 décembre 2008 les autorités israéliennes en prennent prétexte pour déclencher une opération planifiée de longue date contre la bande de Gaza. Cette planification est attestée par les Israéliens eux-mêmes (19). Cette guerre d'une extrême violence contre Gaza fera plus de 1 500 morts, pour la grande majorité des civils, et près de 5 000 blessés.

• Les enseignements du processus de paix

On présente parfois le processus de paix d'Oslo comme un processus quasi harmonieux, qui aurait pu ou dû mener à la paix, mais qui c'est brusquement enrayé à Camp David (2000) presque par accident, le reste n'étant qu'une descente aux enfers pour les deux parties.

A l'inverse J-F Legrain (2009), montrant que le jeu de la négociation américano-israélo-palestinienne ravale la légalité internationale au statut d'objet de la négociation elle-même, estime que "loin de constituer un proto-État, simple étape vers l'indépendance et l'État, l'Autorité intérimaire d'autonomie mise en place à partir de 1994 s'est alors transformée de facto en non-État permanent."

En réalité, le processus s'est bloqué dès lors que les questions centrales ont été abordées : statut de Jérusalem et droit au retour des réfugiés (ce dernier point étant peut-être le plus important (20), tant la conscience nationale palestinienne s'est forgée dans les camps (21)).

Ce blocage survenant quand les questions de fond sont abordées est le premier élément à prendre en compte pour tirer enseignement du processus de paix.

On présente souvent l'échec de Camp David comme la responsabilité d'Arafat, "incapable de faire la dernière concession". En réalité, cette "dernière concession" aurait été une concession fondamentale, abandonnant le coeur des revendications palestiniennes. L'accord d'Arafat aux propositions israéliennes n'aurait d'ailleurs pas été suffisant ; perçu comme une reddition, un tel accord aurait probablement trop entaché sa légitimité pour qu'il puisse le mener à bien. Qu'on se souvienne des manifestations de joie en Palestine au retour d'Arafat de Camp David, justement car il n'avait pas cédé aux demandes israélo-américaines. L'échec de Camp David, le rejet des propositions israéliennes, avait été perçu comme une victoire en soi par les Palestiniens. (Pour une description de l'intérieur, et du côté de la délégation palestinienne, des négociations de Camp David, voir l'ouvrage d'Akram Haniyyé, 2001, "Ce qui s'est réellement passé à Camp David" ; l'auteur, participant aux négociations, montre notamment combien les positions des deux parties étaient irréconciliables, bien que les revendications palestiniennes soient explicitement adossées aux résolutions de l'ONU. Les dernières lignes de l'ouvrage indiquent à quel point un accord à Camp David aux conditions américaines aurait été perçu par les Palestiniens, non comme une avancée définitive vers la paix, mais comme une reddition, un abandon de la revendication nationale palestinienne (22).)

Peut-on parler de processus de paix, quand les propositions d'une des parties sur l'accord final sont obligatoirement inacceptables pour l'autre partie (en cela qu'elles représentent la négation de sa revendication nationale historique) ?

Alternativement, les revendications palestiniennes (Jérusalem capitale des deux Etats, droit au retour des réfugiés, fin de la colonisation) n'étaient, et ne sont toujours, que l'expression des résolutions de l'ONU (sur lesquelles Israël a un droit de véto de fait, quand les résolutions de l'ONU sont jugées non-conformes aux intérêts israéliens).

L'autre élément à prendre en compte est la nature de la mise en oeuvre de l'autonomie. En pratique l'autonomie consistait en la division de la Palestine en une multitude de zones aux statuts évolutifs : A, B et C.

Si ces zones avaient été limitées (par exemple pour la Cisjordanie, trois zones, Nord, Sud, centre) le processus sans être irréversible aurait eu un aspect linéaire (difficulté à revenir en arrière). Mais tel qu'elle était voulue par les Israéliens, la division en zone a consisté à transformer la Palestine en une sorte de damier (ou une "peau de léopard" selon l'expression reprise notamment par P. Blanc (23)), constitué de micro-zones géographiques à statuts différents, empêchant tout continuité géographique et donc la constitution de zones autonomes cohérentes.

Dès lors il était simple pour Israël d'annuler, à n'importe quel moment, le processus d'autonomie en interdisant la circulation entre les zones. C'est ce qui s'est fait à partir de 2003. Plutôt qu'un retour au statu quo ante, les bouclages ont fait de la Palestine une collection d'enclaves, amenant la population palestinienne à vivre dans des conditions bien pires qu'avant le processus de paix.

C'est sans doute de là que date le discrédit progressif du Fatah (discrédit auquel Arafat pouvait échapper par son prestige personnel, mais pas son parti) -- ce discrédit culminera en 2006 avec la victoire législative du Hamas.

Troisième élément à considérer, sans doute le plus important pour expliquer l'échec du processus de paix : la poursuite continue de la colonisation israélienne en Palestine. En 1995, Yitzhak Rabin déclarait : "nous combattrons le terrorisme comme s'il n'y avait pas de processus de paix, et nous poursuivrons le processus de paix comme s'il n'y avait pas de terrorisme". Il aurait pu ajouter : "nous coloniserons la Palestine comme s'il n'y avait pas de processus de paix".

L'accord d'Oslo I prévoyait que les deux parties s'abstiennent de mener des "actions unilatérales". Pour les Palestiniens cette mention devait acter la fin de la colonisation (qui avait débuté au lendemain de la Guerre de 1967).

Mais peu après la mise en oeuvre de l'accord, les Palestiniens s'inquiètent de la poursuite de travaux de colonisation ; le gouvernement Rabin explique alors qu'il ne s'agit "que" de finir la construction de 5 000 logements dans les colonies et qu'après il n'y aura plus de colonisation, sauf par "accroissement naturel" de la population des colonies. Les Palestiniens "avalent la couleuvre".

Ensuite, non seulement la colonisation ne s'arrêtera pas, mais elle se développera à un rythme jamais atteint avant le processus de paix.

Officiellement, les négociations se poursuivent (Taba en 2001, "Feuille de route" en 2003), elles se poursuivent encore actuellement avec Mahmoud Abbas...

Mais ces "négociations" vont de pair avec la colonisation de la Palestine, qui les vide de leur objet.

Même la fin de la colonisation de Gaza n'est qu'un épiphénomène puisque la colonisation en Cisjordanie s'accélère (voir sur ce point l'article de Meron Rapoport, "Quitter Gaza pour mieux garder la Cisjordanie" (24)).

Selon les sources israéliennes, en 2008, le rythme de la colonisation de la Palestine a atteint un pic, les implantations progressant de 57% par rapport à 2007 (25).

En 2008, la colonisation israélienne de la Palestine a totalement morcelé la Cisjordanie, l'isolant notamment de la Jordanie (logique d'enclave et de "ghettoïsation" des populations palestiniennes (26)), la coupant de Jérusalem et la coupant en deux, de façon à rendre non viable toute entité palestinienne sur ce territoire.

Selon Meron Rapoport, "il suffit de regarder une carte pour comprendre que les colonies de Cisjordanie ont été construites selon un plan établi à l'avance, d'une part pour isoler les communautés palestiniennes les unes des autres, et d'autre part pour créer une continuité entre les colonies juives et le territoire de l'Etat d'Israël d'avant 1967. Des implantations ont aussi été bâties autour des quartiers arabes de Jérusalem, pour séparer la partie orientale de celle-ci des villes et des villages palestiniens avoisinants, puis dans la vallée du Jourdain pour séparer la rive ouest du Jourdain de la Jordanie. Des routes furent construites le long de ces colonies, au coeur même de la Cisjordanie, pour couper Naplouse de Ramallah ou Kalkilya de Tulkarem. Grand architecte de la colonisation, M. Ariel Sharon a déclaré ouvertement, en 1975, que son but était d'empêcher la création d'une entité palestinienne." (27)

La carte infra montre l'état de la colonisation de la Cisjordanie et le tracé du Mur.

Pour une analyse complète -- et notamment géographique -- de la colonisation, voir l'ouvrage "Palestine, la dépossession d'un territoire" (28). Les auteurs (spécialistes renommés en agronomie, science politique et géographie) analysent le processus de colonisation, l'annexion unilatérale par la politique du fait accompli, l'instrumentalisation du droit, la mainmise sur la terre et l'eau, et la domination par le nombre ; ils démontrent notamment, à l'aide de nombreuses cartes que la colonisation de la Cisjordanie s'est déployée le plus largement après les accords d'Oslo.

Pendant ce temps là Mahmoud Abbas continue de "négocier". Négocier quoi ? Sans doute rien d'autre que son maintien au pouvoir sur une Autorité palestinienne vidée de substance et de crédibilité (29).

Si on doit faire un bilan du processus ouvert par les accords d'Oslo, il faut conclure que eu égard aux raisons de son échec (colonisation et morcellement de la Palestine et refus des Israéliens d'accéder aux revendications palestiniennes fondamentales : retour des réfugiés et Jérusalem) il n'a jamais été dans les intentions israéliennes de mener le processus à son terme (deux Etats se partageant Jérusalem comme capitale). Si on considère la nature du processus en pratique voulue par la partie israélienne (morcellement de la Palestine), l'échec était parfaitement planifié.

Pour les Israéliens, le "processus de paix" a en réalité visé uniquement à gagner en reconnaissance internationale, à gagner du temps et de la respectabilité (30) afin d'accélérer impunément la colonisation de la Palestine (et de rendre irrévocable l'annexion de Jérusalem par son encerclement par les colonies (31)).

La colonisation pendant le processus de paix s'est avérée un processus extrêmement méthodique. La colonisation pouvait être officielle et assumée par l'Etat israélien ou "sauvage" (colonies implantées sans accord des autorités israéliennes). Entre les deux, comme dans une zone "grise", la colonisation s'est développée librement de façon doublement illégale (c'est-à-dire illégalement selon le droit international -- comme toutes les colonies israéliennes en Palestine -- et illégalement du point de vue israélien). Ces colonies étaient non seulement tolérées, mais connues dans les moindres détails par les autorités israéliennes.

Ainsi, un rapport secret que le quotidien Haaretz s'est procuré début 2009, grâce à une organisation israélienne de défense de droits humains, révèle l'ampleur de la colonisation illégale par Israël en Palestine. Ce rapport contient une base de données qui passe en revue et dans le détail chaque colonie, précisant notamment sa forme, le nombre de ses habitants, le statut juridique de la terre sur laquelle elle a été construite ou encore les avant-postes sauvages situés à proximité.

Le quotidien Haaretz précise que pour environ 75% des 120 colonies de Cisjordanie, "la construction a été effectuée, parfois sur une grande échelle, sans les permis requis ou en contravention avec les permis obtenus. La base de données révèle également que dans plus de 30 colonies, d'importantes constructions d'immeubles publics et infrastructures (routes, écoles, synagogues, écoles rabbiniques et même commissariats de police) ont été effectuées en Cisjordanie sur des terres qui appartenaient à des propriétaires palestiniens privés" (32).

Si on se souvient de la phrase emblématique de la Conférence de Madrid et des Accords d'Oslo ("La terre contre la paix") on mesure le chemin parcouru à rebours par les Palestiniens mais aussi, rétrospectivement, la naïveté de l'espoir suscité puisque la conquête de la terre, loin d'être restituée, constitue le coeur de l'objectif stratégique israélien.

• Coûts et avantages de la colonisation ?

L'impossibilité de détruire militairement le Hamas (qui, qu'on le veuille ou non, a remporté démocratiquement les élections palestiniennes et est donc l'émanation d'au moins une partie du peuple palestinien -- et est majoritaire à Gaza), le piétinement organisé du processus de paix, s'articulent dans une stratégie double : gagner du temps et favoriser l'émergence d'une partie "infréquentable".

Le Hamas devrait sortir politiquement renforcé de l'offensive militaire sur Gaza ; subséquemment sa prise de pouvoir sur l'Autorité palestinienne (élection générale devant se tenir en 2009 ou début 2010) est à portée de main.

Dans ce cas, il sera aisé pour les dirigeants israéliens de déclarer caduc le principe des négociations avec les Palestiniens, qui seront alors stigmatisés comme un "peuple terroriste" (aussi absurde que cela soit (33)) pour avoir choisi des dirigeants islamistes.

On reviendra alors à une constante de la politique israélienne : déclarer ne pas avoir d'interlocuteurs côté palestinien (34). Ce fut le cas avec le refus de reconnaître l'OLP dans les années 70 et 80 (période où Israël s'évertuait à faire croître l'islamisme en Palestine), ce fut le cas ensuite au début des années 2000, en considérant que Yasser Arafat, pourtant lui aussi démocratiquement élu (et laïc), n'était pas un interlocuteur valable (35).

La boucle sera ainsi bouclée, les protestations internationales seront par avance étouffées, et le fait accompli de la colonisation entrera dans sa phase finale.

On pourrait se demander si l'objectif stratégique de gain territorial, passant par la décrédibilisation et/ou la destruction du mouvement national palestinien "mérite", du point de vue israélien, la perpétuation de l'état de guerre.

L'avantage de la colonisation et du refus de conclure le processus de paix est clair du point de vue israélien : c'est le gain territorial, la captation progressive de la totalité de la Palestine historique.

Mais outre le fait que l'état de guerre est un outil au service de la conquête territoriale via la colonisation, l'analyse coûts/avantages semble en faire un choix rationnel du côté israélien.

La société israélienne est une société extrêmement composite, agrégat de plusieurs migrations. Outre le clivage entre Sépharades et Ashkénazes, l'arrivée des Juifs d'Ethiopie (Falasha) en 1984, puis des Juifs de Russie (500 000 entre 1989 et 1992) sont autant de chocs culturels pour la société israélienne (dont témoignent notamment les débats internes en Israël sur qui est juif et reconnu ou non comme tels par le Grand Rabbinat).

En ce sens le maintien de l'état de guerre permet de souder la société israélienne, d'assurer le maintien de son unité.

Concernant le coût de la guerre, il faut noter trois éléments :

- même à l'échelle d'Israël, le conflit reste un conflit de basse intensité,

- l'aide américaine à destination d'Israël finance l'effort de guerre (36),

- la Palestine est un marché entièrement captif dont profite entièrement l'économie israélienne (le pouvoir d'achat, financé par l'aide internationale, est un débouché pour Israël ; même les produits importés profitent à Israël, qui prélève les taxes douanières et les conserve illégalement, faisant de leur reversement une "monnaie d'échange" supplémentaire vis-à-vis de l'autorité palestinienne).

Le conflit de Gaza s'insère dans cette logique : pour Israël, le jeu en vaut la chandelle.

Ce que résume J-F. Legrain (2009) : "Le gouvernement israélien, par delà ses clivages politiciens, aurait ainsi poussé le Hamas à récupérer le flambeau de la résistance nationale palestinienne. (...) Au delà des risques de condamnation d'une disproportion de la violence engagée et d'une réactivation de l'antisionisme et de l'antisémitisme, il aurait ainsi parié sur une redynamisation de l'alignement de la communauté internationale autour de son refus de donner un cadre étatique à l'identité nationale palestinienne au nom d'un refus commun de l'islamisme."

      § PERSPECTIVES

La stratégie israélienne de conquête territoriale se heurtera à un moment ou un autre à un paradoxe. Emietter et coloniser la Palestine posera un jour la question de son annexion au territoire israélien ; c'est l'étape logique du processus en cours (comme ce fut le cas pour Jérusalem et pour le Golan, occupés en 1967, annexés en 1980).

Mais quid alors de la population palestinienne (environ 4,5 millions d'habitants) ? Deux cas sont possibles.

Premièrement l'occupation actuelle pourrait être approfondie, dans le sens où la Cisjordanie serait sous souveraineté israélienne avec quelques bantoustans correspondant aux localités palestiniennes (Gaza étant un autre bantoustan). C'est un schéma d'apartheid (37).

Le problème est alors qu'une fois la conquête de la Palestine achevée, pérenniser un régime d'apartheid (qui prévaut déjà, avec par exemple en Cisjordanie, des routes réservées aux colons juifs, interdites aux Palestiniens dont elles traversent le territoire) finira par heurter les principes démocratiques revendiqués de l'Etat israélien.

(Pour une analyse critique de la démocratie israélienne, et notamment de l'acceptation différenciée de ces principes en fonction des communautés, voir l'article d'Akiva Eldar, journaliste au quotidien israélien Haaretz, "Comment Israël en est arrivé là" (38).)

Deuxièmement, les Palestiniens pourraient se voir attribuer la nationalité israélienne (comme ce fut le cas en 1980 pour les Palestiniens de Jérusalem-Est). Le problème deviendra alors démographique et politique : l'Etat israélien, alors installé sur la totalité de la Palestine historique comprendrait environ 5 millions de juifs israéliens et environ 5 millions d'Arabes, dont un million d'Arabes israéliens actuels (si on excluait Gaza, que les dirigeants israéliens espèrent à terme gérée par l'Egypte, le rapport resterait de 5 millions d'Israéliens pour au moins 3,5 millions de Palestiniens). C'est donc le caractère juif de l'Etat d'Israël qui serait menacé).

Le premier et le second cas amèneraient inéluctablement à un Etat binational (rapidement dans le second cas où au terme d'un mouvement palestinien de type revendication pour les droits civiques dans le premier (39)).

Voici donc le paradoxe : annexer la Palestine, terme logique du développement de l'occupation, amènerait soit à contredire l'aspect démocratique revendiqué d'Israël soit à nier son caractère juif ; or l'Etat israélien repose sur une double identité d'Etat juif et démocratique.

D'un point de vue technique, il ne semble y avoir qu'un moyen de sortir de ce paradoxe : vider la Palestine de sa population avant son annexion. C'est la logique du transfert.

Le transfert est une "solution" prônée par l'extrême droite israélienne. C'est également une idée qui fait son chemin, notamment dans la classe politique israélienne (40). Ainsi, même Tzipi Livni, réputée la plus mesurée des leaders politiques israéliens actuels, a déclaré le 11 décembre 2008 (avant de se dédire) que "les aspirations nationales des Palestiniens d'Israël ne pourraient s'exprimer que dans le cadre d'un Etat palestinien", prônant ainsi implicitement le transfert (41).

Plus explicite est la position du leader radical du Likoud Moshe Feiglin qui propose de payer les Arabes israéliens et les Palestiniens de Cisjordanie "pour qu'ils s'en aillent". Selon lui, ceux qui resteraient devraient alors "faire allégeance à Israël en se montrant des citoyens au-dessus de tout soupçon d'un Etat uniquement régi par des lois juives" (42).

Si cette idée se développe, cela est dû au fait que l'extrême droite monte en puissance ces dernières années dans la politique israélienne et au fait que, pour aussi monstrueuse qu'elle serait, l'expulsion de millions de Palestiniens peut être considérée froidement comme le choix logique ultime découlant de la stratégie israélienne vis-à-vis des Palestiniens (et la façon de sortir du paradoxe précité).

A terme, le transfert est-il improbable ? D'un point de vue technique, l'armée israélienne a sans nul doute les moyens d'une telle politique, même si cela se faisait au prix d'une guerre avec la Jordanie.

Il ne faut surtout pas oublier que les réfugiés palestiniens actuels sont déjà le résultat d'anciens transferts de population palestinienne. On peut éventuellement concevoir que les réfugiés de 1967 soient des réfugiés de guerre (qui n'ont jamais pu rentrer chez eux, l'occupation étant la continuation de la guerre). Mais les premiers réfugiés, ceux de la création de l'Etat d'Israël, n'obéissent pas exactement à la même logique. Si la guerre de 1967 fut courte, le transfert des Palestiniens fin 1947 et 1948 fut le résultat d'une politique méthodique et très organisée. C'est ce que démontre notamment Ilan Pappe (qui fait partie des "nouveaux historiens" israéliens) en reprenant le détail des expulsions des Palestiniens village par village, dans son ouvrage "Le nettoyage ethnique de la Palestine" (2006).

D'un point de vue politique, on constate que les violations par Israël du droit international se font sur un mode crescendo (réoccupation de toute la Cisjordanie, accélération de la colonisation, guerre du Liban en 2006 et guerre contre Gaza en 2008-2009 -- ces deux conflits étant menés essentiellement contre des civils, cf. par exemple la destruction systématique des infrastructures de Gaza dont des hôpitaux et des écoles (y compris gérées par l'ONU), mais aussi du Liban : bombardement de l'aéroport de Beyrouth, destruction de tous les ponts du pays, etc.).

Ces violations du droit international n'entraînent que des critiques extrêmement mesurées de la part des Occidentaux (alors que n'importe quel pays menant une politique identique vis-à-vis de ses voisins ou des populations qu'il contrôle serait sous embargo international). Les résolutions de l'ONU concernant Israël ne sont jamais appliquées (comme si tout dépendait des pays : les résolutions de l'ONU pour le retrait de l'Irak du Koweït appelaient une application inconditionnelle, à défaut de laquelle une guerre a été menée contre l'Irak en 1991 ; à l'inverse le non respect par Israël des résolutions de l'ONU ou des décisions de la CIJ semble sans importance).

Exemple parmi d'autres, la résolution de l'ONU n°465 (1980) enjoint à Israël de "démanteler les colonies existantes et, en particulier, de cesser d'urgence d'établir, édifier et planifier des colonies dans les territoires arabes occupés depuis 1967, y compris Jérusalem"... (Sans compter toutes les résolutions de l'ONU défavorables à Israël et bloquées par les Etats-Unis. (43))

Eu égard à l'impunité dont bénéficie Israël sur la scène internationale, il serait naïf de croire que le pire est impossible.

La seule réelle contrainte serait médiatique. Comment conserver son prestige international en pratiquant massivement des expulsions ? Les mouvements de la gauche israélienne de défense des droits humains feraient tout pour s'opposer à une telle politique.

Les dirigeants israéliens pourront cependant considérer, sans être irrationnels, que ce prix vaut la peine d'être payé pour détenir la totalité de la Palestine historique.

Comment éloigner une telle perspective ? Il ne semble pas crédible d'attendre quoi que ce soit des Etats ; face à cette carence ce sera à la société civile de prendre le relais (associations de lutte contre le racisme, associations de défense des droits humains, altermondialistes, etc.).

Ces actions, fondées sur la défense des droits de l'homme et l'exigence d'universalité du droit international, pourront mettre une "pression" réelle sur les dirigeants israéliens. La piste la plus féconde pourrait bien être les poursuites pénales pour les officiers et responsables politiques israéliens reconnus coupables de crimes de guerre et crimes contre l'humanité.

Deux voies sont alors possibles : les poursuites devant les tribunaux de pays (européens) reconnaissant le principe judiciaire de compétence universelle et les poursuites pénales internationales avec création d'un tribunal pénal international ad hoc, sur le modèle du Rwanda.

Ces deux voies sont complémentaires et n'ont pas à attendre que le pire se produise pour être utilisées. Les associations précitées (et des associations israéliennes de défense des droits humains) pourront aider les Palestiniens à déposer plainte et pourront exercer un travail de "lobbying" afin que des poursuites pénales internationales soient engagées.

L'efficacité ira alors de pair avec l'intensité de ces pressions sur les différents gouvernements, l'effort devra donc être international : l'altermondialisme au service du droit international et de la justice en Palestine ?

Le lancement du Tribunal Russell sur la Palestine (mars 2009) est une première initiative forte en ce sens.

Le Tribunal Russell sur la Palestine (inspiré du Tribunal Russell sur les crimes de guerre au Vietnam (44)) est un acte citoyen qui vise à réaffirmer la primauté du droit international comme base de règlement du conflit israélo-palestinien.

Le Tribunal se basera sur des Comités d'experts et de témoins, chargés d'établir les faits et l'argumentaire juridique qui sera soumis au Tribunal. Des Comités nationaux d'appui devraient assurer la mobilisation populaire et médiatique autour du projet. Ces comités sont déjà prévus pour l'Angleterre, la France, la Belgique, l'Espagne, la Suisse, l'Autriche, les Pays-bas, le Portugal, l'Irlande, le Liban, l'Algérie, l'Australie, l'Italie, l'Afrique du Sud, l'Egypte et, bien sûr, la Palestine et Israël.

Car si le droit international se trouve impunément bafoué par Israël, c'est aussi par l'affirmation sans cesse et partout renouvelée de la primauté du droit que les consciences internationales pourront s'éveiller et -- qui sait ? -- marquer le début de la fin de l'impunité internationale pour les crimes israéliens.

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Notes

1) Sans oublier qu'Israël n'est pas non plus le seul adversaire des Palestiniens (cf. Septembre noir en 1970 en Jordanie, qui voit une tentative d'éradication de l'OLP et de ses structures en Jordanie par les forces armées bédouines du Roi Hussein -- accompagnée de massacres de Palestiniens --; cf. la bataille de Tripoli, suivant la guerre du Liban de 1982, qui voit l'armée syrienne assiéger la ville pour tenter d'éliminer les dernières forces de l'OLP au Liban...).

2) Pour une description plus systématique de la différence de traitement politique et médiatique appliquée aux actions israéliennes et palestiniennes, voir l'article d'Alain Gresh, 2007, "Comment le monde a enterré la Palestine", Le Monde Diplomatique, juillet. Pour plus de détails sur l'attaque du 4 novembre, voir AFPS, 2008-a.

3) Voir dans cette veine, l'éditorial édifiant de Christophe Barbier dans L'Express du 14.01.09, "Une guerre juste, juste une guerre".

4) Pour une analyse de la banalisation de la pratique du "deux poids et deux mesures" dans la classe politique et médiatique française, voir notamment l'article de Dominique Vidal, 2006, "Dix yeux pour un seul oeil...", Le Monde Diplomatique, septembre.

5) Pour une analyse récente des stratégies américaines (ainsi que chinoises et indiennes) pour l'approvisionnement en hydrocabures, voir Laffargue (2009).

6) "Le 11 septembre aidant, on a assisté à une alliance entre les néo conservateurs et les milieux juifs les plus intégristes. Les rapports entre le suzerain et le vassal se sont progressivement inversés. A telle enseigne que l'on peut se demander si les décisions sont prises à la Maison-Blanche ou à Tel-Aviv" (Jean-Michel Quatrepoint, La crise globale, 2008, pages 282-283). Pour une analyse complète de la façon dont les intérêts israéliens façonnent la politique américaine au Proche-Orient, voir l'ouvrage de John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt, Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine, 2007.

7) "Il est vrai que la victoire démocratique du Hamas lui a été volée. Vrai, que la négation quasi unanime de son droit au pouvoir l'a dangereusement isolé. Si bien que nous ne saurons jamais ce qu'il aurait fait s'il avait été pris pour interlocuteur". ("Logique de purification ethnique à Gaza", par Dominique Eddé, Le Monde, 05.01.09.)

8) "Le volontarisme de Barack Obama à l'épreuve du Proche-Orient", Reuters, Mercredi 28 janvier 2009.

9) "Logique de purification ethnique à Gaza", par Dominique Eddé, Le Monde, 05.01.09.

10) Idem.

11) "Un soldat israélien est-il enlevé en juin 2006 ? La communauté internationale ne réagit pratiquement pas à la destruction en représailles de la centrale électrique et de bâtiments civils de Gaza et à une offensive militaire qui fera des centaines de victimes. Deux soldats israéliens sont-ils capturés en juillet 2006 à la frontière libanaise ? Pendant trente-trois jours, la communauté internationale laisse détruire le pays du Cèdre et ses infrastructures. Israël exerce ainsi, paraît-il, son droit de "légitime défense". Et, pendant ce temps, l'extension des colonies rend chaque jour plus improbable la création d'un Etat palestinien." (Gresh Alain, 2007, "Comment le monde a enterré la Palestine", Le Monde Diplomatique, juillet.)

12) "Les Israéliens s'illusionnent s'ils tablent sur un renversement du Hamas par la population", interview par Benjamin Barthe, Le Monde, 05.01.09.

13) Et son parti, le Fatah, a remporté les deux tiers des 80 sièges au Conseil d'autonomie, qui prend le nom de Conseil législatif.

14) Pourcentages n'incluant pas Jérusalem-Est.

15) Le 30 juillet 1980, la Knesset avait proclamé Jérusalem capitale unifiée de l'État d'Israël.

16) "La séparation a d'abord été expérimentée par l'armée israélienne autour de la bande de Gaza, et la construction du mur, en 2002, s'inscrit dans une continuité. Trois millions de Palestiniens se retrouvent ainsi coincés sur une surface qui ne représente plus que 12% de l'ancienne Palestine. Et ce que le gouvernement israélien appelle "assurer la sécurité" consiste à faire pénétrer le mur si loin dans les territoires occupés qu'il entraîne, selon un document des Nations unies de juillet 2004, l'annexion de 8% à 12% de l'étendue totale de la Cisjordanie" (Marina Da Silva, 2007, "Emmurés de Palestine", Le Monde Diplomatique, mai).

17) Le 9 juillet 2004, la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye rend un avis déclarant le mur illégal au regard du droit international et demande à Israël son démantèlement. Le 20 juillet 2004 par la résolution ES-10/15, l'Assemblée générale des Nations Unies demande à Israël de se plier à ses obligations légales telles qu'elles ont été définies par la CIJ.

18) "The disengagement is actually formaldehyde. It supplies the amount of formaldehyde that's necessary so that there will not be a political process with the Palestinians" (Ari Shavit, 2004, "The big freeze", Haaretz, 8 octobre).

19) Voir par exemple : Chossudovsky Michel, 2009, "L'invasion de Gaza : L'opération Plomb durci fait partie d'une vaste opération des renseignements militaires israéliens", Mondialisation.ca, 27 janvier; ou : Matthieussent Delphine, 2008, "Une offensive planifiée -- Israël se préparait depuis six mois à une confrontation dans la bande de Gaza", Libération, 30.12.08

20) "Tout indique pourtant que l'offensive contre Gaza de 2008-2009 s'inscrit dans une logique israélienne déjà ancienne consistant à tout mettre en oeuvre pour repousser sine die tout accord sur le fond avec les Palestiniens -- plus que la question de l'État de Palestine, c'est celle de ses prérogatives, de Jérusalem et des réfugiés qu'Israël ne veut pas voir trancher" (J-F. Legrain 2009).

21) En 2002, j'avais été reçu par des responsables de l'OLP à la Maison de l'Orient à Jérusalem. (La Maison de l'Orient, créée au début des années 1990, était la représentation officieuse de l'OLP à Jérusalem et symbolisait largement le processus de paix. Elle était particulièrement un symbole d'espoir puisque premier indice d'une possible acceptation par Israël de la souveraineté palestinienne sur Jérusalem-Est. La Maison de l'Orient sera fermée de force par les autorités israéliennes lors de la seconde Intifada.) En discutant sur le problème des réfugiés, j'avais argumenté sur le fait qu'Israël, même dans ses frontières de 1967, étant installé sur l'immense majorité de la Palestine historique (en fait 78%), le droit au retour était impraticable. L'un des responsable m'avait alors dit : "Peut-être que c'est vrai, mais même si je le pensais, je ne pourrais jamais le dire à mes enfants". Qu'on imagine alors comment l'abandon du droit au retour pourrait être perçu par les populations des camps.

22) "Notre convoi, Arafat en tête, s'ébranla à 12h30. Nous avions dit un non franc aux Etats-Unis. Ce n'était pas un refus creux ou gesticulatoire, mais un non constructif, sincère, historique, indispensable pour remettre le processus de paix sur de bons rails".

23) Editorial de Confluences Méditerranée du 09.02.09.

24) Le Monde diplomatique, août 2005.

25) Selon l'organisation israélienne La Paix Maintenant (cité par Associated Press le 28.01.09), 1.257 nouvelles structures ont été construites dans les colonies juives de peuplement au cours de l'année 2008 contre 800 en 2007, soit une augmentation de 57%.

26) Pour une description de la vie quotidienne dans les enclaves palestiniennes, voir "Naplouse, Palestine -- Chroniques du ghetto", 2007, par Muriel Rozelier (journaliste française).

27) Rapoport Meron, 2007, "Comment l'occupation a transformé Israël", Le Monde Diplomatique, juin.

28) Blanc Pierre, Chagnollaud Jean-Paul, Souiah Sid-Ahmed, 2007, Palestine, la dépossession d'un territoire, L'Harmattan, Paris.

29) "Qu'a apporté à son peuple le président de l'Autorité palestinienne, en échange de sa totale soumission au pouvoir américain et israélien ? De concession en concession, de poignée de main en poignée de main, il n'a rien obtenu de plus que son maintien au pouvoir. Il a confondu l'ouverture et la capitulation. Il a mis en danger la cohésion de son peuple. Et, durant ce temps, la corruption qui avait causé l'échec électoral de son parti se poursuit impunément". (Dominique Edée, "Logique de purification ethnique à Gaza", Le Monde du 05.01.09.)

30) Quand en 2008, l'OLP proclame la création d'un Etat palestinien avec un Gouvernement en exil, cet Etat est alors reconnu par plus d'Etats qu'Israël. Dès les premières années du processus d'Oslo la situation s'inverse; actuellement la quasi-totalité des Etats non arabes reconnaissent Israël et l'Etat Palestinien est toujours dans les limbes.

31) Sur l'annexion et l'encerclement de Jérusalem, voir l'analyse d'Hind Khoury, "Jérusalem-Est, symbole de l'impunité" (AFPS, 2006).

32) Pour davantage de détail sur ce rapport secret, voir Emilie Lesueur (2009) ou L'Orient le Jour (09.02.09).

33) Mais absurdité ne signifie pas impossibilité, comme en témoignent les déclarations de Claude Goasguen, député UMP de Paris, qui qualifiait en mars 2008 les Palestiniens de "peuple sauvage de terroristes épouvantables" (voir l'article de Zineb Dryef, Rue89.com, mars 2008).

34) "Pour entretenir l'alignement international sur sa politique unilatérale en matière palestinienne, Israël mise depuis longtemps déjà sur la radicalisation de ses adversaires, radicalisation au besoin suscitée par son propre comportement. Les opposants aux politiques israéliennes, quels qu'ils soient nationalistes ou islamistes, doivent être les ennemis de la paix et la modération constitue une menace" (J-F Legrain, 2009).

35) De la même façon, Georges Bush Jr avait accepté, dans un discours prononcé le 25 juin 2002, la perspective d'une solution reposant sur l'existence de deux États, mais en la liant au départ de Yasser Arafat de la tête de l'Autorité palestinienne.

36) Pour une analyse de l'aide économique et militaire des EU à Israël, voir l'article "La controverse sur l'aide américaine à Israël", MIFTAH, avril 2004, AFPS (france-palestine.org/article291.html).

37) Pour une analyse comparative détaillée de la situation en Palestine et en Afrique du Sud, voir notamment l'article de Farsakh Leila, 2003, "De l'Afrique du Sud à la Palestine", Le Monde Diplomatique, novembre.

38) Akiva Eldar s'interroge sur les raisons profondes de la nomination d'Avigdor Lieberman, politicien d'extrême droite, au discours raciste assumé, au poste de vice-premier ministre d'Israël. Dans le contexte post guerre du Liban de 2006, l'auteur considère que de façon générale et notamment en comparant Israël à ses voisins, "sur le plan structurel et formel, Israël est une démocratie très développée ; mais, en termes de morale, cette démocratie reste fragile et vulnérable -- elle est même tombée au plus bas." D'un point de vue plus historique, l'auteur rappelle les années de "gouvernement militaire" imposées aux Arabes israéliens (1948-1966) avec les restrictions de libertés appliquées sur une base ethnique et/ou religieuse : "c'est d'ailleurs là une autre preuve de la non-assimilation des valeurs démocratiques : la majorité écrasante de la population juive, y compris le gros des élites, a accepté comme une évidence la politique de ségrégation institutionnalisée à l'endroit de la minorité arabe". Enfin, l'auteur relie dans une analyse prospective, l'intégration différenciée des principes démocratiques selon les communautés formant la société israélienne, en considérant notamment que les migrants de l'ex-URSS sont moins imprégnés de culture démocratique : "les valeurs de la démocratie sont également étrangères aux juifs orthodoxes comme aux religieux de la droite nationaliste, qui regroupent désormais environ un quart de la population israélienne -- une proportion appelée à augmenter, vu leur taux de natalité trois fois supérieur à la moyenne nationale." (Eldar Akiva, 2006, "Comment Israël en est arrivé là", Le Monde Diplomatique, décembre.)

39) Plutôt que des "négociations" qui ne mènent à rien et plutôt qu'une résistance vouée à l'échec eu égard à la disproportion des forces, certains leaders palestiniens (notamment Mustapha Barghouti, élu au Conseil législatif palestinien) se déclarent plus ou moins ouvertement favorables à la création d'un Etat binational incluant donc Israël et les Territoires Occupés. "Des intellectuels renommés des deux bords ont affirmé le caractère inévitable d'une telle solution (Etat binational). De nombreux ouvrages défendent désormais cette idée. Tous partent d'un même constat: l'échec des accords d'Oslo et le morcellement des territoires palestiniens occupés en de multiples bantoustans. Bref, la région avance vers l'abîme d'un nouvel apartheid plutôt que vers la coexistence de deux Etats indépendants viables." (Farsakh Leila, 2007, "L'heure d'un Etat binational est-elle venue ?", Le Monde Diplomatique, mars.)

40) "Outre sa politique systématique de morcellement, d'effritement des territoires occupés, tout indique que le pouvoir israélien nourrit le rêve d'expulser d'Israël ses populations non juives. De prôner partout la séparation. De démembrer la région, en autant de morceaux communautaires. Gaza étant le morceau du morceau du morceau." (Dominique Edée, "Logique de purification ethnique à Gaza", Le Monde du 05.01.09.)

41) AFPS, 2008-b, "Livni se dédit et exclut une expulsion des Arabes d'Israël", 14.12.08.

42) Serge Dumont, 2008, "Proche Orient: Le leader radical au sein du Likoud avait fait l'apologie du nazisme", Le Temps, 13 décembre.

43) Mearsheimer et Walt (2007) montrent ainsi qu'entre 1972 et 2006, Washington a mis son veto à 42 résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU critiquant la politique israélienne.

44) Du nom du prix Nobel de littérature de 1950, Bertrand Russell, auteur du livre War Crimes in Vietnam publié en 1966, le Tribunal Russel est une initiative portée par des intellectuels et activistes occidentaux opposés à la Guerre du Vietnam. Siégeant à partir de 1967, le Tribunal Russel enquêtera sur les atrocités commises par l'armée américaine au Vietnam et sur les complicités d'autres pays alliés des Etats-Unis.

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Références

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