Avigdor Lieberman

Avigdor Lieberman

Avigdor Lieberman — de son vrai nom Evik Lvovitch Liberman — naît le 5 juin 1958 dans une famille juive ashkenaze de Chisinau (ex Kichinev, en Bessarabie roumaine soviétique), aujourd'hui capitale de la Moldavie. Son père, Lev Yankelevitch Liberman, est membre du Betar, une organisation sioniste extrémiste. Le jeune Evik (ou Evet) suit des études d'agronomie à Kichinev avant d'émigrer avec sa famille en Israël en 1978. Il effectue son service militaire dans les rangs de Tsahal et change son nom en Avigdor Lieberman. Il entame ensuite des études de sociologie tout en effectuant divers petits boulots, entre autres de videur de boîte de nuit et de bagagiste à l'aéroport Ben Gourion. Après avoir décroché un diplôme de Sciences politiques à l'université hébraïque de Jérusalem, il se marie et s'installe en 1988 à Nokdim, une colonie juive illégale implantée en Cisjordanie.

En 1993, Avigdor Lieberman, à l'époque partisan du Kach de Meir Kahane (mouvement terroriste sioniste interdit après le massacre de 24 Palestiniens dans le Caveau des Patriarches), entre au Likoud, le parti de la droite libérale sioniste dirigé alors par Menahem Begin. Se positionnant sur une ligne dure ultra-nationaliste, il grimpe rapidement les échelons de l'administration israélienne jusqu'à devenir Chef de cabinet du Premier ministre Benjamin Netanyahou entre 1996 et 1997. En 1999, à la suite des accords de Wye River signés avec le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat — qu'il qualifie de "chien" et de terroriste à exécuter sans état d'âme --, il quitte le Likoud pour fonder son propre parti baptisé Israël Beiteinou ("Israël notre foyer" en hébreu). Il fonde également une revue d'extrême-droite intitulée Yoman Yisraeli, dont il devient le rédacteur en chef. Surfant dès lors sur la grande vague migratoire venue d'ex-URSS dans les années '90, Avigdor Lieberman se fait élire à la Knesset (le Parlement israélien) en prônant une politique haineuse ouvertement raciste et colonialiste. En mars 2001, il est nommé ministre des Infrastructures mais démissionne l'année suivante, lors du déclenchement de la seconde Intifada, en appelant à bombarder massivement l'ensemble des infrastructures palestiniennes. Il demande l'expulsion des Palestiniens des territoires occupés illégalement par Israël et souhaite priver de droits civiques les citoyens Arabes israéliens qui ne prêteraient pas serment de loyauté à l'Etat juif. Il multiplie également les déclarations inciendiaires à l'encontre du Liban, de l'Iran et de l'Égypte. En 2003, il devient ministre des Transports dans le gouvernement d'Ariel Sharon mais celui-ci le limoge lorsqu'il s'oppose avec véhémence au désengagement israélien de la Bande de Gaza. Il propose à la place un programme ségrégationniste visant à séparer les Israéliens juifs des Arabes musulmans afin de "créer deux États ethniquement homogènes". Concrètement, il s'agit d'annexer les prospères colonies illégales de l'Etat juif pour mieux reléguer les Palestiniens dans des ghettos où ils ne pourront pas s'organiser. Il réagit aussi à un projet d'amnistie de prisonniers palestiniens en déclarant qu'il serait préférable de les emmener à la mer pour les noyer. Sur un plan plus privé, cette personnalité violente et sans scrupules est parallèlement mise en cause dans plusieurs affaires de brutalités, de corruption, d'abus de confiance et de blanchiment d'argent.

Aux élections législatives de 2006, son parti Israël Beiteinou remporte 11 sièges à la Knesset. Fort du soutien d'une base qui dépasse désormais largement la population russophone, Avigdor Lieberman appelle à bombarder l'Iran et demande la mise à mort des députés arabes israéliens ("l'ennemi intérieur") coupables selon lui de "collaboration avec le Hamas". Il rejoint le gouvernement d'Ehud Olmert à titre de Ministre des Affaires stratégiques mais démissionne en 2008 pour protester contre les négociations de paix avec les Palestiniens dans le cadre de la Conférence d'Annapolis. Lors des élections législatives de 2009, alors que Tsahal (l'armée israélienne) massacre quelque 1.500 civils Palestiniens dans la Bande de Gaza transformée auparavant en camp de concentration à ciel ouvert, il déplore que le gouvernement israélien n'ait pas recours à la bombe atomique, "comme les Etats-Unis en 1945" à Nagasaki. Sa surenchère raciste et va-t-en guerre finit par payer. Son parti Israël Beiteinou gagne 15 sièges à la Knesset, soit deux de plus que le Parti travailliste, et devient la troisième force politique du pays. Avigdor Lieberman remplace alors Tzipi Livni comme ministre des Affaires étrangères. Fort de son succès électoral et de sa position incontournable dans le paysage politique israélien, le nouveau chef de la "diplomatie" israélienne ne cesse depuis de provoquer la communauté internationale, des pays arabes modérés à l'Union Européenne en passant par l'Iran, la Syrie et même les Etats-Unis de Barack Obama.

En mars 2015, lors d’un meeting électoral tenu dans la ville de Herzliya, près de Tel Aviv, Avigdor Lieberman déclare que les Arabes israéliens qui ne sont pas fidèles à Israël doivent être décapités à la hache: "Ceux qui sont de notre côté méritent beaucoup, mais ceux qui sont contre nous méritent de se faire décapiter à la hache". Il estime en outre que tous ceux qui dénoncent la politique d'Israël menée contre les Palestiniens méritent d'être condamnés à mort.

Selon l'historien israélien Zeev Sternell, spécialiste du fascisme européen, Avigdor Lieberman, qu'il compare à Benito Mussolini, est "le plus dangereux politicien de l'histoire d'Israël". De Bernard Kouchner à François Hollande en passant par Nicolas Sarkozy et Laurent Fabius, la plupart des dirigeants français l'ont reçu officiellement en France.

Copyright © A. M. Levy / La République des Lettres, Paris, jeudi 4 juillet 2019. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite. Les citations brèves et les liens vers cette page sont autorisés.

Journal de la République des Lettres Éditions de la République des Lettres Brève histoire de la République des Lettres À propos de la République des Lettres Plan du site Contact & Informations légales