Recep Tayyip Erdogan

Biographie Thomas De Quincey
Thomas De Quincey
De l'Assassinat considéré comme un des Beaux-Arts

Éditions de La République des Lettres
ISBN 978-2-8249-0195-4
Prix : 5 euros
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Recep Tayyip Erdogan

Scène inhabituelle dans les salons feutrés du World Economic Forum (WEF, Forum Économique Mondial de Davos), d'ordinaire très consensuel. Un débat animé par le journaliste pro-israélien du Washington Post David Ignatius réunit le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, le président israélien Shimon Pérès, le Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon et le Secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa. Shimon Peres dépasse largement son temps de parole sans que le "modérateur" intervienne. Pendant plus de 25 minutes, le président israélien monopolise le micro pour tenter de justifier la politique d'apartheid menée contre les Palestiniens ainsi que les massacres commis récemment par l'Etat juif dans la Bande de Gaza. Il tient des propos véhéments, interpelle agressivement M. Erdogan à plusieurs reprises en élevant la voix et lui demande "Que feriez-vous si Istanbul était touchée chaque nuit par des dizaines voire des centaines de roquettes ?". Recep Tayyip Erdogan commence à lui répondre mais l'animateur du débat l'interrompt immédiatement, refusant de le laisser parler. Passant outre M. Erdogan parvient à lancer à Shimon Peres: "Je pense que vous devez vous sentir un peu coupable pour parler si fort. Vous avez tué des civils. Je me souviens des enfants qui sont morts sur des plages". David Ignatius réintervient immédiatement pour lui couper la parole en lui indiquant avec insistance que le débat est clos. Enervé, Recep Tayyip Erdogan se lève alors et quitte le plateau sans plus de formalités, plantant là le journaliste, son interlocuteur et le public.

Lors d'une mini-conférence de presse improvisée à la sortie de la salle, le Premier ministre turc explique que "le modérateur a accordé au président israélien 25 minutes de parole contre 12 minutes au total pour moi, il n'est pas intervenu lorsque le président israélien s'est tourné vers moi en haussant le ton et il n'a rien dit pendant qu'il enfreignait les règles observées normalement dans les débats, ici à Davos". [...] "J'ai du respect pour M. Peres et pour son âge (ndr: 85 ans), c'est pourquoi je n'ai pas élevé la voix. Mais ce qu'il disait n'était pas vrai. Nous avons les faits pour nous. Ma réaction était dirigée envers l'animateur". Il affirme qu'il ne reviendra sans doute plus au Forum Économique Mondial de Davos. Pour Amr Moussa, "M. Peres a effectivement dit beaucoup d'inexactitudes, auxquelles ni M. Erdogan ni moi n'avons eu la possibilité de répondre", ajoutant qu'Israël "a une place spéciale à Davos".

De retour en Turquie après ce quasi incident diplomatique, Recep Tayyip Erdogan a été accueilli par une foule de milliers de partisans venus saluer son geste en brandissant des drapeaux turcs et palestiniens et en scandant des slogans anti-israéliens. Selon l'agence de presse turque Anatolie, Shimon Pérès l'aurait appelé pour lui présenter ses excuses mais Israël dément catégoriquement, indiquant que les deux dirigeants n'ont eu qu'une conversation téléphonique "amicale".

La Turquie, Etat laïque lié par divers accords économiques aux Etats-Unis, est l'un des principaux alliés d'Israël dans la région. Un accord de coopération militaire a même été signé en 1996 entre les deux pays et Ankara joue actuellement un rôle de médiateur dans le conflit israélo-palestinien, mais la population turque, à dominante musulmane, est nettement pro-palestinienne. Recep Tayyip Erdogan, ancien militant islamiste arrivé au pouvoir en 2002, a vivement condamné l'offensive israélienne dans la Bande de Gaza, au point d'être accusé par la presse libérale turque d'être partisan du Hamas. Le Mouvement de la Résistance Islamique a publié une déclaration de soutien au premier Ministre turc et a salué sa "démarche courageuse".

Copyright © Jean Bruno / republique-des-lettres.fr, Paris, vendredi 30 janvier 2009. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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