Bernard Kouchner

Un méchant vent venu d'Afrique tourne depuis quelques jours autour de Bernard Kouchner. Le célèbre french doctor -- défenseur de la cause des droits de l'homme à géométrie variable, ex-socialiste libéral-libertaire atlantiste, chouchou des médias de gauche et de droite, inventeur du droit d'ingérence humanitaire (sauf pour Israël) et personnalité soit-disant préférée des Français, devenu pour toutes ces raisons ministre des affaires étrangères de Nicolas Sarkozy -- est en effet aujourd'hui mis en cause dans une vulgaire histoire d'affairisme mêlant diplomatie française et potentats africains.

L'affaire est révélée par un article publié sur le site web de Marianne qui cite les extraits d'un livre du journaliste d'investigation Pierre Péan intitulé Le monde selon K. (éditions Fayard, à paraître début février). L'auteur d'Affaires africaines y affirme qu'en mai 2007, alors qu'il était déjà installé au Quai d'Orsay, Bernard Kouchner serait intervenu auprès du président gabonais Omar Bongo, alors en visite officielle à Paris, afin d'exiger le règlement de 800.000 euros de factures dûes à deux sociétés privées auxquelles il était lié. Ces deux sociétés, Africa Steps et Imeda, étaient dirigées par deux de ses proches qui travaillent aujourd'hui officiellement au Quai d'Orsay: Eric Danon (actuel ambassadeur à Monaco) et Jacques Baudouin (actuel ambassadeur à Genève auprès de la Conférence pour le désarmement). Entre 2004 et 2006, avant donc d'être propulsé au Quai d'Orsay, Bernard Kouchner travaillait comme Consultant pour les deux hommes via ses propres sociétés, BK Conseil et BK Consultants. Il aurait à ce titre rédigé un rapport pour la mise en place d'un système d'assurance maladie au Gabon. Selon Pierre Péan, Bernard Kouchner -- qui s'illustrait également à l'époque comme conseiller de la firme Total en Birmanie -- s'est également fait le VRP d'Imeda auprès du Gabon d'Omar Bongo alors qu'il occupait (à titre bénévole toutefois) une haute fonction publique puisque Président du groupement d'intérêt public "Ensemble pour une Thérapeutique Hospitalière en Réseau" (ESTHER).

Si l'information est exacte, ces services du ministre Bernard Kouchner comme employé de recouvrement au Gabon fait quelque peu mauvais genre, d'autant plus qu'il reste semble-t-il gérant de BK Consultants alors que "les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec tout emploi public ou activité professionnelle".

Pour Bernard Kouchner, tout cela est de la calomnie. Dans un communiqué publié en ligne sur France-Diplomatie (le site du Ministère des Affaires étrangères), il indique que "depuis sa prise de fonction en tant que ministre des Affaires étrangères et européennes [il] a cessé toute activité au sein des sociétés BK Conseil et BK Consultants", ajoutant que "la société BK Conseil a été dissoute le 18 mai 2007" et que depuis sa nomination "BK Consultants n'a plus aucune activité commerciale et ne saurait avoir perçu quelque rémunération que ce soit". Il "s'enorgueillit" en outre "d'avoir toujours mené [...] un combat permanent en faveur de la santé publique en Afrique" et se "réserve le droit d'engager des poursuites judiciaires pour prévenir ou sanctionner toutes allégations mensongères à son égard". À suivre.

Copyright © Jean Bruno / republique-des-lettres.fr, Paris, mardi 13 janvier 2009. Droits réservés pour tous pays. Toute reproduction totale ou partielle de cet article sur quelque support que ce soit est interdite.
Noël Blandin / La République des Lettres
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